L’Agence nationale des fréquences (ANFR) devait elle rendre publiques les mesures de contrôle des téléphones portables ?
C’est ce que demandaient deux lanceurs d’alerte, le médecin Marc Arazi (ancien coordinateur national de l’association Priartem) et la journaliste Fabienne Ausserre, ont demandé à l’ANFR de publier les données de ces tests, afin d’informer les utilisateurs de la nature de leur appareil qui, face au refus de l’agence, ont saisi la justice. Sans résultat, malgré l’avis favorable, en novembre 2016, de la commission d’accès aux documents administratifs (Cada).
L’affaire remonte à juillet 2016, avec la publication par l’Anses de son rapport «Exposition aux radiofréquences et santé des enfants».
L’agence y faisait état d’une série de mesures effectuées par l’ANFR, selon lesquelles 89% des 95 téléphones testés dépassaient le débit d’absorption spécifique (DAS) de 2 Watt/kg (valeur seuil fixée pour la tête et le tronc) et 25% la valeur de 4 W/kg (seuil pour les membres). Pourtant tous ces appareils, testés par l’ANFR entre 2012 et 2015, étaient bien aux normes : les mesures effectuées par lagence portaient sur une distance de 5 millimètres, alors que la directive européenne alors en vigueur (directive dite R&TTE, Radio & Terminal Telecommunication Equipment, mars 1999) permettait aux fabricants de tester leurs appareils à la distance de 25 mm.
Or la directive R&TTE a été abrogée par une nouvelle directive 2014/35/UE effective depuis le 13 juin 2016. «Cette nouvelle directive prévoit, pour évaluer la conformité des équipements, de prendre en compte les conditions de fonctionnement raisonnablement prévisibles. En l’espèce, l’utilisateur est susceptible d’être au contact de l’appareil», expliquait l’Anses dans son avis.
«C’est un enjeu essentiel de santé publique pour les utilisateurs » déclaraient les 2 lanceurs d’alerte. Peu d’entre eux le savent, mais il ny a pas besoin que l’appareil soit en mode téléphone : il suffit quil soit allumé dans la poche, il communique constamment avec l’antenne-relais la plus proche»,expliquent-t-ils.
Beaucoup d’appareils hors normes ?
Exit donc les 25 millimètres. Résultat : une fois écoulée la période transitoire d’un an prévue par la nouvelle directive (qui prendra donc fin le 12 juin), les appareils épinglés en 2015 par l’ANFR ne seront plus aux normes. D’ici là, les téléphones commercialisés avant juin 2016 peuvent rester en magasin. Quant aux appareils déjà achetés, c’est le black-out : ni rappel, ni information des propriétaires. Les résultats obtenus par l’ANFR montrent que «des dizaines de millions de jeunes en Europe ont un téléphone qui pose problème.
Et au même moment en Italie une audience en référé tenue mercredi 19 avril au tribunal administratif de Melun. Les résultats des tests pratiqués par l’Agence nationale des fréquences (ANFR) sur des téléphones portables resteront secrets : jeudi 20 avril, le tribunal administratif de Melun lui a donné raison contre deux lanceurs d’alerte qui demandaient la transmission de données.
Rappelons que dés 2011 à l’initiative de l’OMS une trentaine d’experts internationaux avaient estimé que l’usage du portable pouvait être cancérogène pour l’homme et réclamé que de nouvelles études soient menées sur l’utilisation intensive et sur le long terme des téléphones portables. En attendant, ils avaient plaidé pour l’utilisation de « kits mains libres » et la pratique des SMS.
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Et en même temps un jugement prononcé dans le Piémont italien (région de Turin) par le tribunal d’Ivrea le 11 avril dernier, et rendu public a reconnu un lien entre l’apparition d’une tumeur bénigne chez un homme de 57 ans et l’usage de son téléphone portable, son travail dans une grande entreprise l’ayant conduit à s’en servir entre trois et quatre heures par jour pendant 15 ans.
Roberto Romeo âgé de 57 ans, était, ironie du sort, technicien à Turin au sein d’une grande entreprise de téléphonie mobile italienne. Utilisant son portable à raison de quatre heures par jour depuis 1995, il ressent en 2010 les symptômes de sa maladie sous la forme d’une sensation permanente d’oreille bouchée avant que ne soit diagnostiqué un neurinome auriculaire. « Par chance, il ne s’agit que d’une tumeur bénigne, mais néanmoins invalidante. J’ai dû subir l’ablation du nerf acoustique et je suis sourd du côté droit », a-t-il indiqué.
Ce ” jugement reconnaît le lien de causalité entre un usage inapproprié du téléphone portable et une tumeur au cerveau”, ont rapporté les avocats du plaignant. Le jugement est toutefois susceptible d’appel. “Désormais, nous pensons qu’il est nécessaire de réfléchir sur ce problème et prendre des mesures adaptées” ont-ils poursuivi.
L’expert nommé par le juge a évalué son préjudice corporel à 23 % et condamné l’Institut national d’assurance contre les accidents du travail (INAIL) à lui verser une indemnité de 500 euros par mois pour le restant de ses jours en raison de ce préjudice subi.