Sur des échelles de temps très longues et en l’absence de perturbation, le climat terrestre trouve un équilibre entre l’énergie entrante (celle du Soleil) et l’énergie sortante (celle qui est renvoyée dans l’espace). C’est ce que l’on appelle la température d’équilibre :
- Si un objet reçoit plus d’énergie qu’il n’en perd, sa température augmente
- Sa température augmentant, l’objet va perdre davantage d’énergie
- L’équilibre est atteint lorsque l’énergie que perd l’objet est exactement compensée par l’énergie qu’il reçoit
Une façon de mesurer la manière dont les humains bousculent le climat est d’observer le déséquilibre énergétique de la Terre (DET), ou Earth Energy Imbalance : Jusqu’alors, seules deux forces étaient capables de modifier cet équilibre. La première est naturellement le Soleil, dont l’activité peut croître et décroître, faisant varier la quantité d’énergie que reçoit notre petite planète. La deuxième est le volcanisme.
Il existe désormais une troisième force capable d’influencer le climat de la planète Terre : les humains. « L’influence humaine est désormais suffisamment forte pour perturber l’équilibre énergétique terrestre de manière manifeste », écrivent les auteurs d’une étude d’évaluation du DET menée par Karina von Schuckmann et son équipe, et publiée dans Nature en janvier 2016.
Autrement dit, presque toute l’énergie solaire piégée sur Terre depuis 250 ans par les gaz à effet de serre émis par les humains a été absorbée par les océans, qui recouvrent 70,3 % de la surface terrestre. Une petite partie seulement l’a été par les terres émergées, l’atmosphère et les glaces (7 %). C’est pourtant cette faible part qui est responsable de presque l’intégralité du réchauffement mondial mesuré jusqu’à présent (plus 1 degré en 2017 par rapport à l’ère préindustrielle). La menace est d’autant plus réelle que le rythme auquel les océans absorbent le surplus d’énergie provoqué par les humains croît de façon spectaculaire et n’a jamais été aussi haut. Ceux-ci ont absorbé autant d’énergie entre 1997 et 2015 que depuis 1860, d’après une étude menée par Peter Glecker et son équipe et publiée dans Nature en janvier 2016.
En raison de la capacité des océans à stocker ce surplus d’énergie, ce qui agit comme un tampon, les températures moyennes de surface « ne sont pas un bon indicateur du réchauffement climatique sur ces échelles de temps », conclut Schuckmann. La question de savoir comment elle est absorbée et par quels composants est cruciale pour les scientifiques, car elle permet de beaucoup mieux comprendre comment va évoluer le climat dans les décennies à venir.