L’OMS vient de publier un rapport sur la résistance aux antibiotiques à partir de données recueillies dans 114 pays, qui abouti à la conclusion que « cette grave menace (pour la santé publique) n’est plus une prévision, mais bien une réalité dans chaque région du monde, et que tout un chacun, quels que soient son âge et son pays, peut être touché ».
Le rapport de l’OMS souligne que la résistance aux antibiotiques, notamment ceux de « dernier recours » contre des infections potentiellement mortelles, est rencontrée pour des agents bactériens nombreux et très divers. Pour le Dr Keiji Fukuda, Sous-Directeur général de l’OMS pour la sécurité sanitaire, « À moins que les nombreux acteurs concernés agissent d’urgence, de manière coordonnée, le monde s’achemine vers une ère postantibiotiques, où des infections courantes et des blessures mineures qui ont été soignées depuis des décennies pourraient à nouveau tuer ».
Le phénomène de résistance aux antibiotiques consiste en une évolution des bactéries couplée à une sélection des souches, qui se caractérise par l’inefficacité des antibactériens à soigner une infection bactérienne pour laquelle ils étaient auparavant efficaces. Il est lié à plusieurs causes. Les plus connues relèvent de la médecine humaine et vont de la mauvaise observance des traitements antibiotiques par les patients, à leur prescription abusive ou inappropriée par les médecins. En revanche, un autre phénomène, moins médiatisé bien qu’il soit responsable de la majorité des volumes d’antibiotiques consommés, est celui de la médecine vétérinaire, notamment dans l’élevage intensif.
En effet, l’élevage intensif poursuit un but de croissance rapide des bêtes, qui se traduit par la sélection de races et d’alimentation optimisant le temps de croissance des animaux, au détriment de leur santé et de leur adaptation aux lieux. Cette fragilité, génétique d’une part et liée à l’alimentation d’autre part, est potentialisée par une densité de population élevée, propices à la transmission d’agents infectieux. L’ensemble des ces facteurs mènent à l’utilisation intempestive d’antibiotiques, parfois même en préventif lorsqu’une maladie est suspectée chez un sujet. Le vétérinaire D. Fric affirme par exemple avoir « consulté les fiches d’un élevage intensif de volailles, où les animaux ont reçus une dose d’antibiotique un jour sur trois ».
Le problème dans ce cas est toujours la sélection de bactéries résistantes, qui risquent d’une part de se retrouver dans notre assiette, et d’autre part de disséminer dans la nature via les effluents d’élevage, contaminant ainsi l’eau. Or il est à rappeler que les antibiotiques, comme les autres médicaments, ne sont pas éliminés par les stations d’épuration.
Premier rapport de l’OMS sur la résistance aux antibiotiques: une menace grave d’ampleur mondiale