Chaque année, au milieu du mois de janvier, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) rend public son bilan démographique de la France.
Avec une certaine inquiétude les observateurs ont rendu compte de la quatrième année de baisse consécutive de l’indicateur naissance . 758 000 nouveaux bébés sur l’année, 12 000 de moins qu’en 2017, 60 000 de moins qu’en 2014… Tout juste pouvait-on se consoler de rester le pays le plus fécond de l’Union européenne.
A la fin dudit bilan, une série d’autres chiffres a laissé les commentateurs de marbre. Et pourtant… Depuis quatre ans, l’espérance de vie des Français a cessé de croître. Cet indicateur, sans doute un des plus symboliques de l’état de santé d’un pays et des progrès qu’il enregistre, plafonne. Pour être tout à fait précis, l’espérance de vie à la naissance des hommes, qui atteignait 79,2 ans en 2014, a enregistré une minuscule progression de deux mois pour s’arrêter à 79,4 ans en 2018. Quant à celle des femmes, traditionnellement supérieure, elle est passée, dans le même temps, de 85,4 ans à 85,3 ans. L’espérance de vie des Français, c’est-à-dire la durée de vie moyenne d’une génération, a gagné trente ans au XXe siècle, mais a cessé de croître depuis 2015.
On peut se rassurer en constatant que le phénomène, bien qu’inédit, n’est pas propre à la France. En Allemagne, aux Pays-Bas, en Australie, en Grande-Bretagne, partout au sein du monde développé l’inflexion est sensible. Aux Etats-Unis, on observe même depuis trois ans un recul inquiétant de l’espérance de vie, notamment du fait d’une explosion des overdoses médicamenteuses, des suicides et des maladies chroniques provoquées par l’obésité. Autre piste à ne pas négliger : le creusement des inégalités qui taraude les sociétés occidentales. Même si celui-ci reste moins marqué en France, l’Insee constate qu’un individu qui appartient à la catégorie des 5 % les plus pauvres a une espérance de vie inférieure de treize ans à un autre faisant partie des 5 % les plus riches. On imagine sans mal que le déclin des classes moyennes observé un peu partout ne peut que tirer l’ensemble vers le bas en termes d’espérance de vie.
De très nombreux facteurs contribuent à l’allongement de la vie.
Sur longue période, les conditions de vie s’améliorent, le travail est moins pénible physiquement et le nombre d’heures de travail baisse. Plus qualifiés, les individus sont de plus en plus attentifs à leur santé et à leur corps en particulier (hygiène, alimentation, etc.). L’accès aux soins progresse. La qualité des soins et l’innovation en matière de santé jouent mais on constate peu de relations au plan international entre le système de soins lui-même et l’espérance de vie. Dans les années plus récentes, les progrès qui ont le plus accru l’espérance de vie ont surtout été réalisés en faveur des personnes les plus âgées, autour de 80 ans pour les femmes et 70 ans pour les hommes, principalement par une amélioration des traitements des cancers et des maladies de l’appareil respiratoire.