Dans la revue Nature, une équipe de chercheurs avait déjà publié en 2009 le principe de limite planétaire, elle reprend cette notion en ce début 2015 en publiant une mise à jour de cette étude dans Science et identifie quatre limites déjà franchies ou en cours de dépassement. Ces conclusions seront présentées au Forum économique mondial de Davos de fin janvier.
Selon les chercheurs, les principales limites transgressées sont celles du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité. Les deux autres seuils franchis relèvent de dégâts locaux : l’un tient au changement rapide d’utilisation des terres, l’autre à la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore – deux éléments essentiels à la fertilité des sols.
Pour le climat, les auteurs estiment que la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone (CO2) ne doit pas dépasser une valeur située quelque part entre 350 parties par million (ppm) et 450 ppm. La teneur moyenne actuelle est d’environ 400 ppm, soit au beau milieu de la ligne rouge. « Il y a une marge d’incertitude importante, dit le climatologue Will Steffen (université nationale australienne, université de Stockholm), premier auteur de l’étude. Cela signifie qu’au dessus de 350 ppm il y a une augmentation du risque d’effets dommageables dans certaines régions, comme ce que l’on peut par exemple observer avec les canicules et les sécheresses en Australie. Et au-dessus de 450 ppm, nous pensons avec un bon niveau de confiance que les impacts toucheront l’ensemble du globe. »
Ainsi, selon Johan Rockström, directeur du Stockholm Resilience Center de l’université de Stockholm et coauteur de l’étude, l’objectif des deux degrés de réchauffement, fixé par la communauté internationale comme limite à ne pas dépasser, « représenterait déjà, même s’il était atteint, des risques significatifs pour les sociétés humaines partout sur Terre ».
L’actuelle érosion de la biodiversité est sans appel. Les auteurs estiment que la diversité du vivant peut s’éroder à un rythme de 10 espèces par an sur un capital d’un million, sans impacts majeurs pour les société humaines. Cette limite est largement dépassée par le taux d’érosion actuel, 10 à 100 fois supérieur. « Attention : la biodiversité ne se réduit pas à une liste d’espèces et d’autres indicateurs sont également pertinents, commente pour sa part le biologiste Gilles Boeuf, président du Muséum national d’histoire naturelle. Ici, les auteurs ont également cherché à estimer le maintien de l’intégrité des fonctions remplies par la biodiversité, en raisonnant par exemple au niveau de groupes d’espèces qui remplissent des fonctions semblables. »
« Par rapport à notre publication de 2009, l’une des avancées est que nous identifions les limites planétaires sur le climat et la biodiversité comme fondamentales, explique Will Steffen. Car transgresser une seule d’entre elles a le potentiel de conduire le système-Terre dans un nouvel état. »