Alors que le Ministre de l’écologie annonçait fin février qu’elle était prête à donner l’autorisation de prolongement de la durée de vie des centrales de 10 ans ( passant de 40 à 50 ans): décision qui s’inscrirait dans le cadre de la baisse de la part du nucléaire de 75 à 50% dans la production d’électricité, nos pays voisins s’inquiètent d’une telle décision..
Toutes les installations nucléaires françaises ont été construites, majoritairement , dans les années 80. Elles étaient conçues pour 30 ans lors de la mise en œuvre, leur longévité a déjà été reportée à 40 ans ce qui aurait donné 2020. On entre dans une période où les enjeux en termes de sûreté sont sans précédent. La poursuite du fonctionnement des réacteurs d’EDF au-delà de quarante ans est un enjeu de sûreté majeur, c’est très compliqué techniquement. EDF estime les travaux à 55 milliards d’euros, ce qui donne une mesure de leur ampleur.
La loi de transition énergétique prévoit de réduire à 50% la part de l’atome dans la production électrique de la France à horizon 2025 et plafonne à son niveau actuel de 63,2 gigawatts la production nucléaire du pays. Cette dernière disposition contraindra EDF à fermer deux réacteurs, normalement ceux de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), pour compenser la mise en service du réacteur EPR de Flamanville, reportée à fin 2018. 40 ans est un âge déjà respectable, qui oblige aussi à se demander comment améliorer la sûreté en fonction des nouveaux standards post-Fukushima( d’autant que nous commémorons cette année les 30 ans de Tchernobyl et les 5 ans de Fufushima).
La date de fermeture de Fessenheim approche et EDF investit des dizaines de millions d’euros pour sa sûreté. Pourquoi ne pas l’arrêter tout de suite ? question se posent certains responsables de la sureté.
L’ASN s’est prononcée en 2011 ou 2012 sur les deux réacteurs de Fessenheim en disant qu’ils pouvaient fonctionner dix ans de plus, sous réserve qu’il soit fait des améliorations onéreuses pour assurer la sûreté.
Le Président de l’Autorité de sûreté nucléaire( ASN), Pierre-Franck Chevet, déplore le manque de prise de conscience des risques.
«Il faut imaginer qu’un accident de type Fukushima puisse survenir en Europe» Or, nous n’avons pas obtenu à ce stade les moyens supplémentaires nécessaires pour assurer pleinement notre tâche. Nous sommes donc contraints, en 2016, de nous concentrer sur les installations qui fonctionnent, le risque le plus urgent est là” , or l’aval de l’Autorité de sûreté, seule habilitée à autoriser cette prolongation, par son président, Pierre-Franck Chevet, a clairement annoncé que son feu vert n’était à ce stade « nullement acquis ».
Face à ces enjeux qui montent, les acteurs du nucléaire ne sont pas en pleine forme, c’est le moins qu’on puisse dire. Ils ont tous, EDF, Areva, mais aussi le CEA, confrontés à de grosses difficultés économiques, financières ou budgétaires. La concomitance de ces constats montre que la situation est préoccupante à court et moyen termes.
Notre pays voisin la Suisse s’agite à nouveau autour de l’atome. Le même jour où son Conseil national s’attaquait au débat énergétique et on apprenait que la centrale nucléaire de Mühleberg cesserait son activité en 2019, la Ville de Genève et le Canton lançaient leur offensive contre la centrale française du Bugey. Ils viennent de déposer une plainte contre X, visant le site du Bugey, dans l’Ain, pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui ». La centrale du Bugey située dans l’Ain, est à 70 kilomètres à vol d’oiseau de Genève, le Bugey étant l’une des plus anciennes installations nucléaires de France.Deux des cinq réacteurs de la centrale du Bugey ne fonctionnent plus et un entrepôt de déchets radioactifs est en construction sur le site.
Considérée comme très vétuste, la centrale de Bugey fonctionne depuis les années 1970. Dans les années 90, la ville de Genève avait déjà mené le combat contre la centrale nucléaire de Creys-Malville (Isère), qui a cessé de fonctionner en 1998.
Et c’est maintenant l’Allemagne qui demande à la France la fermeture de Fessenheim : cette exigence, maintes fois réitérée, est étayée par un incident survenu voilà presque deux ans sur le site alsacien, bénin aux yeux de l’Autorité de sûreté française, pas pour nos voisins allemands qui jugent que l’incident a été minimisé en France.
A ce propos encore l’ASN (Autorité de sûreté “gendarme du nucléaire français”) ne l’a jamais caché : un accident nucléaire majeur est possible en France, et ses conséquences s’étendraient bien au-delà des limites hexagonales, outre-Rhin, au Luxembourg ou en Suisse.