Lancée après la deuxième guerre mondiale, la «révolution verte» n’avait de vert que le nom, comme le confirment Pedro Pellegrini et Roberto Fernández, agronomes à l’université de Buenos Aires (Argentine). Une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences (Pnas) nous met en évidence la véritable demande énergétique de l’agriculture à l’échelle mondiale.
La production végétale mondiale a triplé au cours des 50 dernières années,( entre 1961 à 2014) principalement par une augmentation du rendement (production / superficie). Nous montrons que l’énergie intégrée dans les principaux intrants pétroliers (machinerie, carburant et engrais) a augmenté dans le monde entier à un rythme plus important (il y a eu une augmentation de 137% de la consommation d’intrants par hectare), cependant moins rapide au cours des dernières décennies, que la production agricole.
Cela a été expliqué par les progrès dans l’industrie des engrais azotés, l’irrigation, et d’autres technologies et peut-être quelques changements environnementaux. Ces résultats correspondent au «paradoxe de Jevons*»: les gains d’efficience, tant pour l’EUE que pour la terre (rendement), n’ont pas permis de réaliser des économies de ressources. Tout comme l’augmentation de la production ne garantit pas la réduction de la faim, les technologies permettent de réaliser des économies sur les terres (et la biodiversité), mais leur réalisation dépend de décisions politiques audacieuses.
Dans l’ensemble, l’efficacité de l’utilisation de l’énergie (production végétale / intrants) a suivi une trajectoire en U commençant à 3 et se terminant près de 4. Les perspectives d’une intensification plus durable sont discutées, et l’inadéquation du modèle d’épargner la nature sauvage via l’agriculture intensifiée est mise en évidence.
*Le paradoxe de Jevons a initialement été formulé par l’économiste britannique du nom de William Stanley Jevons dans son livre Sur la question du charbon en 1865. L’homme va faire une observation capitale qui peut nous être utile aujourd’hui. Ce paradoxe est le suivant : À mesure que les améliorations technologiques augmentent l’efficacité avec laquelle une ressource est employée, on observe que la consommation globale de cette ressource augmente. En termes simples, plus une énergie est maîtrisée (donc démocratisée), plus sa consommation augmente: une réflexion à avoir dans le cas d’une transition énergétique réussie.