Jean Jouzel nous cible les enseignements de la crise sanitaire

Que retenir de cette crise afin de lutter plus efficacement contre le plus grand défi auquel l’humanité est confrontée, celui du réchauffement climatique ?*

Le paléoclimatologue et membre de l’Académie des Sciences Jean Jouzel nous livre ses réflexions

De plus en plus d’articles scientifiques font un parallèle entre la lutte contre la pandémie de coronavirus, la perte de biodiversité et la lutte contre le réchauffement climatique. L’exemple phare étant la déforestation qui participe au réchauffement en émettant des gaz à effet de serre et en réduisant le stockage naturel du carbone,  elle met en contact les êtres humains avec des espèces sauvages favorisant ainsi la transmission des zoonoses. Cependant l’échelle des temps s’avère très différente : “La pandémie s’est répandue dans un délai très court : le virus est arrivé en France en trois mois. Or le problème du réchauffement climatique est celui de l’échelle de temps : il y a plusieurs décennies d’écart entre les causes du réchauffement et ses conséquences principales”.

” La difficulté majeure d’appréhension du changement climatique réside dans ce décalage temporel qui conduit à ce qu’il faille que ses effets soient perceptibles et commencent à se faire sentir pour que les décideurs et les gens prennent conscience du problème. Or, il aurait alors fallu agir dès le départ, soit quelques décennies plus tôt, et rappelons tout de même que cette conscientisation a commencé avec la conférence de RiO en 1992. “Les 30 dernières années ont démontré la solidité de la communauté scientifique du climat”.

Mais avouons que pas plus les Etats que le citoyens, n’ont mis en œuvre les changements importants tels qu’ils auraient du être faits,  désormais des plans de relance intégrant la climat sont annoncés,  mais il reste encore un écart énorme entre les textes et la réalité puisqu’il faut multiplier par 5 nos efforts d’ici 2030 afin de rester, à long terme, sous le seuil de 1,5°C de réchauffement planétaire, espérons qu’une fois de plus , le long-terme ne sera pas  sacrifié au profit du court-terme.

“Une vraie vision politique devrait  prendre en considération le moyen et le long terme et envisager une transition écologique porteuse de développement et d’emplois : le manque d’anticipation reste trop souvent la mise en politique ce qui en fait sa faiblesse”.

Nous savons ce que nous devons faire. Avec Pierre Larroutourou, je me suis impliqué dans le Pacte Finance-Climat. Au niveau de l’Europe, il faudrait investir plus de 1000 milliards d’euros chaque année afin de réussir la transition écologique d’ici 2030 (300 milliards d’Euros supplémentaires chaque année, 20 milliards pour la France).

Pour en savoir plus :

« Climat – Parlons vrai » de Jean Jouzel & Baptiste Denis – Editions Les Pérégrines 2020 https://editionslesperegrines.fr/fr/books/climat