La pollution de l’air touche-t-elle avant tout les personnes des classes sociales défavorisées ? La situation est plus complexe que cela, et dépend en grande partie des villes, révèle une étude menée dans 16 grandes villes européennes et publiée dans la revue Environment International.
Plusieurs études, d’abord aux Etats-Unis puis en Europe, se sont penchées sur l’exposition à la pollution de l’air selon le niveau socio-économique de la population. Avec des résultats très contrastés à ce jour : pour certains auteurs, les pauvres sont plus exposés, tandis que d’autres travaux montrent que ce sont plutôt les riches.
Menée par Sofia Temam, de l’unité mixte de recherche «Vieillissement et maladies chroniques» de l’Inserm (Villejuif), et ses collègues européens, une étude menée dans 16 villes de huit pays –dont Paris, Lyon, Marseille et Grenoble-, s’est penchée sur la question, utilisant pour chacune les mêmes indicateurs socio-économiques. D’une part des critères individuels (niveau socio-économique, niveau d’études), d’autre part des critères collectifs (taux de chômage dans le quartier).
Résultats différents selon les indicateurs
Les résultats révèlent une situation complexe: quand les chercheurs ne tiennent compte que du taux de chômage, les quartiers les plus touchés sont bien surexposés à la pollution de l’air, et ce dans 11 des 16 villes analysées. Par exemple pour les quatre villes françaises, le taux de dioxyde d’azote (NO2) est de 35 µg/m3 d’air lorsque le taux de chômage dépasse 9,5%, mais de seulement 27 µg/m3 lorsqu’il est en-dessous.
A l’inverse, les chercheurs n’ont découvert aucune association statistiquement significative entre les facteurs individuels (niveau socio-économique et niveau d’études) et l’exposition au NO2. Du moins dans 14 des 16 villes: pour les deux autres (Lyon et Vérone, en Italie), les personnes de moindre niveau d’études sont en revanche moins exposées à la pollution.
Un profil différent selon les villes
Selon les chercheurs, «les inégalités sociales face à la pollution de l’air présentent un profil complexe dans les villes européennes, et ne peuvent être traitées qu’au sein de chaque ville. Nos résultats montrent par ailleurs l’importance de prendre en compte aussi bien les facteurs socio-économiques individuels et collectifs, de manière à bien décrire la complexité de ces profils d’inégalité».
Autre complexité, une plus grande exposition à la pollution de l’air n’est pas toujours synonyme d’une plus grande vulnérabilité sanitaire.A Paris , dont des travaux publiés en 2015 ont montré que la pollution au NO2 y était plus forte dans les beaux quartiers, mais que la mortalité suite aux pics de pollution était plus élevée dans les quartiers moins favorisés.