Les zones côtières où grandissent les huîtres sont particulièrement exposées aux pollutions agricoles.
« Les huîtres peuvent être comparées à des aspirateurs marins, explique Thomas Sol Dourdin, doctorant à l’Ifremer. Ce sont des organismes filtreurs ! Tout ce qu’il y a dans l’eau (que ce soit du plancton, des résidus de métaux, des microplastiques ou des pesticides) passe dans l’huître ; aussi ce n’est pas surprenant que l’Ifremer ait aboutit à ces conclusions.
Dans le cadre de sa thèse soutenue en 2015, Audrey Barranger a exposé en laboratoire des huîtres au diuron, un herbicide fréquemment détecté dans les rivières et eaux côtières françaises parcolation des sols voisins. « Nous l’avons fait pendant la période de production de gamètes, qui s’étend principalement de juin à septembre, moment où l’on retrouve de fortes concentrations de pesticides dans le milieu marin » explique-t-elle. Ces expérimentations ont été réalisées à des concentrations « réalistes » de diuron, équivalentes à celles que l’on peut retrouver sur les côtes françaises. Le diuron n’est pas la seule substance chimique avec laquelle les huîtres peuvent entrer en contact. Atrazine, alachlor, glyphosate… Voilà quelques-uns des ingrédients du cocktail toxique dans lequel baignent ces délicieux mollusques. L’Ifremer a mené des études pour évaluer les effets de ce mélange insolite. Ces recherches ont également montré que l’herbicide avait des effets « épigénétiques » sur l’huître, c’est-à-dire des conséquences sur ses facultés d’adaptation.
En parallèle, la chercheuse a observé des anomalies de développement et un taux de croissance plus faible chez les mollusques exposés. « On ne peut pas faire de lien de cause à effet, mais nous avons une forte présomption que l’exposition au diuron pourrait expliquer ces performances physiologiques moindres », commente Farida Akcha, chercheuse au laboratoire d’écotoxicologie à l’Ifremer et ancienne directrice de thèse d’Audrey Barranger.
La dispersion de pesticides n’est pas le seul problème induit par l’agriculture intensive, la gestion et la qualité des eaux posant d’autres questions sur la pérennité des activités aquacoles. Pour que les huitres puissent se reproduire, grossir dans des conditions optimales, il reste évident que les mélanges d’eau salée et douce doivent être de qualité.