En 1990, l’OMS avait estimé à un million le nombre d’intoxications graves aux pesticides. Si on relève des différences dans l’emploi de pesticides dans le monde, il en existe également au sein même de l’Union européenne, première puissance agricole mondiale.
« En 2008, lors du Grenelle de l’environnement, le gouvernement avait décidé de lancer le 1er plan Ecophyto avec comme objectif de réduire de 50 % l’utilisation de pesticides en dix ans. Dix ans après le Grenelle, en 2018, la France a enregistré une hausse de 21%de sa consommation de pesticides. C’est alors qu’un nouveau plan Écophyto II+ a été voté le 10 avril 2019. Ce dernier qUII A pour objectif la réduction de 50 % des usages de pesticides d’ici 2025, en prévoyant une sortie du glyphosate d’ici fin 2020 de nouveau non tenue”
En l’espace de trente ans, leur consommation mondiale a bondi en moyenne de 81 %. Un chiffre qui englobe aussi bien la baisse de 3 % en Europe, que l’augmentation de 484 % en Amérique du Sud. Les premiers exposés sont les 860 millions d’agriculteurs que compte notre planète et qui utilisent ces produits régulièrement. D’après l’étude pilotée par le PAN(Pesticides Action Network International), 43,6 % d’entre eux seraient chaque année victimes d’une intoxication grave.entre 1990 et 2018, ce continent a augmenté sa consommation de pesticides de 95 %. À l’autre bout du globe, l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale se distinguent également. Pas moins de cinq des dix pays les plus touchés par les décès dus aux intoxications graves s’y trouvent.
Cette hausse de production et de consommation de pesticides, on la doit notamment aux industries Bayer (allemande), BASF (allemande), Corteva Agriscience (américaine), FMC (américaine), et Syngenta (suisse). À elles seules, ces cinq entreprises réunies au sein du lobby CropLife contrôlent 65 % du marché mondial des pesticides. Une investigation menée par l’ONG suisse Public Eye, et Unearthed, le journal d’investigation de Greenpeace, a levé le voile sur la nature des transactions de ces firmes. Au moins un tiers de leur chiffre d’affaires a été réalisé grâce à la vente de pesticides considérés comme « extrêmement dangereux » pour la santé et l’environnement. Classés sous la dénomination HHP — highly hazardous pesticides, des pesticides particulièrement dangereux — par l’OMS, leur utilisation est interdite en Europe… mais pas leur production.
Chaque année dans le monde, combien de personnes sont victimes de ces graves intoxications ? C’est la question à laquelle a tenté de répondre une équipe de chercheurs chapeautée par Wolfgang Bödeker, consultant scientifique pour le réseau PAN (Pesticides Action Network International). Ils ont analysé 157 publications scientifiques, concernant 141 pays, et récolté les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) — alimentées par les gouvernements — répertoriant les causes des décès. Résultat : chaque année, au moins 385 millions d’intoxications graves aux pesticides provoqueraient onze mille morts (hors décès par ingestion de pesticides). Ces conclusions ont fait l’objet d’une publication dans la revue scientifique BCM Public Heal, mais « sont à considérer comme un minimum », explique à Reporterre Wolfgang Bödeker.L’équipe s’est basée sur la littérature scientifique et a été confrontée à un manque de publications pour certains pays.
« Les symptômes les plus courants dans les cas d’intoxications graves aux pesticides sont d’ordre respiratoire et neurologique, avec un possible passage en réanimation. Une seule fois peut suffire à laisser des séquelles graves ou mener à un décès », dit à Reporterre la doctoresse Cécile Stratonovitch, membre de l’association Alerte des médecins sur les pesticides.
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, fait le même constat : «Dans les pays en développement, les pesticides extrêmement dangereux peuvent présenter des risques significatifs pour la santé humaine […], car les mesures relatives à la réduction des risques telles que l’emploi d’équipement de protection individuelle et l’entretien et le réglage du matériel […] ne sont pas efficaces». Et par ailleurs si on relève des différences dans l’emploi de pesticides dans le monde, il en existe également au sein même de l’Union européenne.
D’après un article de Reporterre
[1] La Cour des comptes a publié en février 2020 un référé sur le bilan des plans Écophyto estimant « que les effets des plans Écophyto demeurent très en deçà des objectifs fixés ».