Tous les articles par Jacqueline Collard

La 6ème limite planétaire est franchie : celle de l’eau douce

En effet les seuils fixés pour le cycle de l’eau bleue, comme avant lui celui de l’eau verte, sont dépassés.

Une nouvelle étude sur les dépassements des limites planétaires, publiée dans la revue Science Advances, vient ausculter l’état de notre environnement. Et les conclusions ne sont pas rassurantes à propos des grands cycles de l’eau. Ces précieuses informations scientifiques estiment que les niveaux de perturbations ne devraient plus être dépassés pour maintenir la Terre avec les fonctions environnementales que nous connaissons, c’est donc plus important que jamais d’en prendre acte et d’agir.

« Nous ne savons pas pendant combien de temps nous pourrons continuer à transgresser ces frontières clés avant que les pressions combinées ne conduisent à des changements et des dommages irréversibles », a alerté Johan Rockström, coauteur de cette étude et chercheur au Stockholm Resilience Centre.

Le système terrestre s’avère de plus en plus en difficultés : le changement climatique, les cycles de l’azote et du phosphore, l’acidification des océans, l’érosion de la biodiversité, les changements d’usage des sols, l’eau douce, la charge en aérosols atmosphériques, l’appauvrissement de la couche d’ozone et les nouveaux composés chimiques créés par l’homme (par exemple : les microplastiques, les pesticides, etc.). Elles estiment les niveaux de perturbations qui ne devraient pas être dépassés pour maintenir la Terre avec les fonctions environnementales que nous connaissons.

Pour les scientifiques, cette nouvelle étude doit jouer un rôle de signal d’alarme.

https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.adh2458

Un décret sur l’eau de pluie qui interroge quant à ses applications

Le décret du 29 août sur les eaux usées traitées et les eaux de pluie remettrait-il en question certains usages non domestiques de l’eau de pluie, comme l’arrosage des espaces verts des bâtiments ?

Il était préconisé et même encouragé, dans le cadre des réflexions sur la gestion de l’eau, de récupérer de l’eau de pluie. Mais un décret interroge sur sa survenue en cette fin d’été. Alors que cette démarche écologique et économique permet de faire face aux nombreuses sécheresses qui menacent le territoire, les raisons de restrictions sanitaires sont justifiées mais ne remettent-elles pas en question des ré-utilisations  judicieuses?

Nous les rappelons ci dessous:

« Art. R. 211-127.-L’utilisation des eaux mentionnées aux articles R. 211-124 et R. 211-125 n’est pas possible sur le fondement de la présente section pour les usages suivants :
« 1° Alimentaires, dont la boisson, la préparation, la cuisson et la conservation des aliments, le lavage de la vaisselle ;
« 2° D’hygiène du corps et du linge ;
« 3° D’agrément comprenant, notamment, l’utilisation d’eau pour les piscines et les bains à remous, la brumisation, les jeux d’eaux, les fontaines décoratives accessibles au public et l’arrosage des espaces verts des bâtiments.

Le décret du 29 Aout 2023
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000048007367

Une enquête européenne sur la pollution atmosphérique en Europe

Nous sommes informés de la conclusion inquiétante d’une enquête publiée par le journal anglais The Guardian. Environ 30 millions d’Européens vivent dans des zones où les concentrations de particules fines sont au moins quatre fois supérieures aux recommandations OMS. Il serait ainsi  analysé que  98 % de la population vivrait dans des zones où la pollution par les particules fines (PM2,5) est très nocive. Et pourtant les principaux polluants ont fortement baissé au cours des 20 dernières années, mais la qualité de l’air reste globalement mauvaise sur la majeure partie de l’Europe, rappelle l’Agence européenne de l’Environnement, et l’on dénombre 238 000 décès prématurés qui sont causés par cette pollution dangereuse dans l’Union européenne.

L’organisation mondiale de la Santé hausse le ton et durcit ses critères relatifs à la qualité de l’air qui concernent six polluants dont les dernières études démontrent qu’ils sont une grave menace pour la santé et l’environnement. Aucun pays n’est épargné par la pollution atmosphérique et des millions de vie pourraient être sauvées si ses préconisations étaient appliquées. Certains vivent dans des zones quatre fois supérieures à ces limites.

En Allemagne, les trois quarts de la population vivent avec plus du double de la valeur recommandée pour les PM2,5. En Espagne, ce chiffre est de 49 % et en France de 37 %. À l’inverse, les pays d’Europe occidentale du nord sont les moins impactés, notamment l’Islande, la Norvège, la Suède et la Finlande. Tandis que pour la pollution aux particules PM10 elle est la plus élevée dans le sud de l’Europe : Italie, Bosnie, Serbie, Macédoine, Bulgarie et Turquie.

Ces informations confortent les connaissances déjà acquises : les zones les plus touchées par la pollution de l’air sont, là encore sans surprise, les régions les plus pauvres et où vivent les populations les plus défavorisées du continent.


20 ans après la mise en place des PPRT quels sont les effets ?

La loi « risques » du 30 juillet 2003 sur la prévention des risques technologiques,  promulguée après l’accident d’AZF (il y a 22 ans) n’a produit que « très peu d’effets », déplorent dans un rapport les communes accueillant des sites Seveso sur leur territoire, par la présence de raffineries,  complexes chimiques ou sidérurgiques, sites de stockage de produits extrêmement dangereux…

Ainsi avaient été instaurés des plans de prévention des risques technologiques (PPRT)  dans les territoires accueillant des installations à haut risque dites « Seveso seuil haut » dans le but d’améliorer la protection des populations. À ce jour c’est 378 PPRT (concernant les 400 sites Seveso seuil haut existant en 2003, contre 700 en 2023) qui  sont  en vigueur et concernent 800 communes. Ils s’appliquent directement à des milliers d’entreprises et impactent 9 millions de personnes vivant sur ces territoires concernés. Pour les 300 autres sites Seveso seuils haut, de simples règles d’urbanisme s’appliquent désormais aux collectivités.

  • La Cour des Comptes avait fait en juin une analyse des améliorations  à apporter par l’Etat,
  • L’association Amaris a procédé  à une enquête avec l’ENTPE (École nationale des travaux publics de l’État) une enquête destinée à recueillir les retours d’expérience des collectivités concernées, sur les conditions de l’élaboration des plans comme outil de prévention, comme facteur d’aménagement du territoire ou encore comme élément de réorganisation de leur propre structure. 47 réponses ont été analysées, représentant 44 collectivités et 36 PPRT différents, soit approximativement 10 % des PPRT approuvés sur l’ensemble du territoire : il est nécessaire de proposer une une nouvelle stratégie nationale PPRT 2023 – 2033.

https://documentation.insp.gouv.fr/insp/doc/SCOOPIT/901E46A1F86FA3BA528CAF5C90DD8DDA/la-gestion-publique-des-risques-rapport-de-la-cour-des-comptes-nbsp

https://www.amaris-villes.org/wp-content/uploads/2023/09/Dossier-Presse-AMARIS.pdf

Et l’on reparle du fameux glyphosate à Bruxelles

Malgré les risques et les incertitudes, la Commission européenne a proposé ce 20 septembre 2023 de renouveler pour dix ans l’autorisation du glyphosate dans l’UE, sous conditions, après le rapport d’un régulateur estimant que le niveau de risque ne justifiait pas d’interdire cet herbicide controversé. La proposition de l’exécutif européen sera examinée le 22 septembre par les représentants des 27 états membres, qui devront ensuite la valider à une majorité qualifiée lors d’un vote le 13 octobre. Déjà plusieurs voix s’élèvent pour dénoncer cette décision marquée par le poids du lobby phytosanitaire .

Cela nous paraît incroyable compte tenu des multiples études qui en démontre sa toxicité. La Commission refuse de prendre en compte les faits scientifiques : le glyphosate est dévastateur pour notre biodiversité. Le glyphosate suscite la controverse. Herbicide « miracle », commercialisé depuis les années 1970 par Monsanto, entre-temps racheté par Bayer, permettant de détruire uniquement les mauvaises herbes dans les cultures, il est aujourd’hui le plus utilisé au monde par les exploitants agricoles. Longtemps présenté comme sans aucun danger pour la santé, il est considéré comme « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) depuis 2015.

Début juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait  indiqué ne pas avoir identifié de « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l’environnement susceptible d’empêcher l’autorisation de l’herbicide .

Pourtant, d’autres expertises avaient abouti à d’autres conclusions, comme celles de l’Inrae et de l’Ifremer, instituts de recherche publics spécialistes de l’agriculture et de la mer, qui ont souligné la réalité de la contamination de l’environnement par les pesticides, et l’impact négatif sur la biodiversité et les écosystèmes. Leur méta-analyse avait mobilisé pendant deux ans une quarantaine d’experts qui avaient passé en revue quelque 4 000 études scientifiques déjà publiées, dans un contexte français ou comparable, pour faire une synthèse des connaissances sur l’impact des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les écosystèmes.

EFSA Journal 2023;21(4):7939