Tous les articles par Jacqueline Collard

Limiter le réchauffement planétaire à 2° : « réaliste et économiquement bénéfique »

L’Agence Internationale de l’Energie (IAE) estime « réaliste et économiquement bénéfique » le scénario du Groupement International d’Experts sur le Climat (GIEC) limitant le réchauffement planétaire à 2°C (plus bas seuil encore accessible), par rapport à celui des 6°C que l’on observera si notre modèle actuel persiste.

Atteindre les 2°C nécessite de réduire nos émissions actuelles de gaz carbonique (tous secteurs confondus) de 75% en 2050 par rapport à 2010. Or pendant ce temps, la population mondiale devrait croître d’un tiers, les surfaces destinées au tertiaire augmenter de 60%, et la consommation d’électricité s’accroitre de 75% pour ne citer que ces exemples. Néanmoins, la seule dépense en énergies fossiles dans le scénario des 6°C représenterait le triple de celle qui devra être investie pour assurer la transition vers un système énergétique sobre : soit environ  40 000 milliards USD contre 318 000 milliards.

Pour les auteurs du rapport : « Nous disposons des instruments et des mécanismes nécessaires pour introduire des changements et des innovations profondes conduisant à un futur énergétique abordable, sûr et durable. » La majeure partie de la solution provient de l’efficacité énergétique (28%), suivie par le recours aux renouvelables (30%). Suivent la capture et le stockage du carbone (13%), le changement d’énergie dans les usages (10 % – par exemple électricité, hydrogène, biogaz ou biocarburant dans les transports). Le tout devrait permettre de passer de l’émission de 55 milliards de tonnes de CO2 en 2050 dans le scénario 6°C, à environ 15 milliards de tonnes dans le scénario 2DS.

Les auteurs signalent toutefois que : «  Les tendances récentes mettent en évidence la nécessité d’accélérer l’innovation en matière de technologies énergétiques, ce qui exigera notamment un soutien politique et une nouvelle organisation des marchés. » Une autre étude, datant de septembre 2014, estime que pour éviter un réchauffement supérieur à 2°C, le taux de décarbonisation des économies devrait être plus de cinq fois supérieur au taux actuel.

Plus d’informations sur :

Energy Technology Perspectives 2015 – Mobilising Innovation to Accelerate Climate Action

Global economies must lower carbon emissions at five times the levels currently achieved

Gestion de l’eau à l’heure du changement climatique

Avec le changement climatique les scientifiques prévoient l’augmentation des événements climatiques extrêmes, tant en intensité qu’en fréquence, rendant la question de la gestion des eaux sensible. En effet, si nous devons faire face à de longues périodes de sécheresse, nous serons aussi confrontés à des violents orages, et avec eux leur cortège de défis (inondations, contamination du milieu par déversement des eaux de pluies chargées en métaux lourds, carburants et autres pollutions, …).

Certaines communes particulièrement vulnérables aux inondations, comme Bordeaux, ont d’ores et déjà pris le parti de lutter via un système de gestion intelligente des eaux de pluie. Ces dispositifs technologiques couplent l’anticipation, grâce aux données météorologiques, métrologiques, hydrauliques ou encore hydrologiques, avec la gestion dynamique, qui optimise toutes les infrastructures de recueil et traitement des eaux redirigées. Néanmoins, ces systèmes permettant de gérer les fortes pluies coûtent cher sans s’attaquer aux racines du problème.

Car si le changement climatique accentue les effets, une cause profonde des risques sanitaires liés à l’eau, qu’il s’agisse de pénurie ou de gestion des excédents, réside dans l’imperméabilisation des sols qui a avancé ces dernières décennies au rythme de l’urbanisation. C’est pourquoi le plan d’adaptation au changement climatique du bassin Rhône-Méditerranée a retenu la désimperméabilisation les sols comme un axe majeur de travail. En effet, valables en ville (toiture végétalisée, création de bandes enherbées), comme en zone rurale (restauration de zones humides, …), les projets d’infiltration des eaux permettent à la fois de laisser les nappes se recharger et de protéger des crues les communes en aval. La métropole de Lyon préserve ainsi les terres agricoles et naturelles en limitant l’extension péri-urbaine et l’artificialisation des sols, dans une logique d’infiltration des eaux.

Le changement climatique a commencé : les territoires font démarrer leurs actions d’adaptation pour l’eau

 

 

Incendie à Tchernobyl, causes et conséquences sanitaires.

Une étude publiée dans Oecologia montre que «les arbres morts, les plantes et les feuilles sur le site contaminé (de la forêt de Tchernobyl) ne se décomposent pas à la même vitesse » que les plantes poussant ailleurs dans le monde. En effet les radiations ionisantes ne se contentent pas de vider les pins de leur chlorophylle pour valoir à la forêt son surnom de « forêt rouge », ou encore d’engendrer des malformations macroscopiques chez la faune peuplant les lieux. C’est tout l’écosystème qui est perturbé, jusqu’aux champignons et microbes impliqués le processus naturel de pourrissement de la matière. Les chercheurs ont en effet montré que les feuilles de la zone contaminée se décomposaient beaucoup plus lentement qu’ailleurs : en un an, elles gardent 60% de leur poids tandis que des feuilles témoins perdent jusqu’à 90% de leur poids de départ.

Cette matière sèche favorise alors l’apparition et la propagation de feux de forêt. On recense ainsi depuis la catastrophe d’avril 1986 pas moins d’un millier d’incendies dans la forêt rouge, de taille plus ou moins importante. Par ailleurs, l’évolution des conditions météorologiques, liée au changement climatique, pourrait encore accentuer cette tendance.

Or aux alentours de Tchernobyl, l’enjeu sanitaire des fumées ne se limite pas aux polluants classiques des feux de forêts, comme les dioxines, déjà nocifs pour la santé, mais s’y ajoute la problématique des particules de césium 137 remises en suspension pour être dispersées au gré des vents. L’Institut de radioprotection (IRSN) a relevé un triplement du niveau de radiation sur le sol français suite aux incendies spectaculaires de 2002, 2008 et 2010 pour atteindre 1,5microbéquerel par mètre cube d’air. Pour P. Renaud de l’IRSN, ce niveau reste faible et ne devrait pas entraîner d’impact sanitaire. Ces propos sont à nuancer puisque s’il est admis qu’il faut un seuil plus élevé pour voir apparaître les premières lésions tissulaires, le risque cancérigène est en revanche communément considéré « sans seuil » dans la littérature scientifique. Toute augmentation du niveau de radioactivité augmente donc la probabilité d’apparition de cancer dans la population exposée.

Highly reduced mass loss rates and increased litter layer in radioactively contaminated areas

Fire evolution in the radioactive forests of Ukraine and Belarus: future risks for the population and the environment

Le nouveau sarcophage de Tchernobyl devrait être fini en 2017

Pour recouvrir le réacteur nucléaire accidenté de Tchernobyl, le budget nécessaire semble avoir été bouclé par la dernière conférence du G7.

Cette conférence était présidée par l’Allemagne, présidente du club des pays du G7 cette année, avec l’appui de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) qui coordonne les donations pour sécuriser le site nucléaire en Ukraine. Les 180 millions promis mercredi, fournis majoritairement par l’Union européenne et les pays du G7, s’ajoutent aux 350 millions d’euros promis en novembre par la Berd.

Le premier sarcophage de béton avait été construit à la va-vite juste après la catastrophe d’avril 1986 qui avait entraîné une contamination en Europe. Mais près de 30 ans plus tard, celui-ci est fissuré à de nombreux endroits, posant le problème du confinement des matières radioactives, d’où la nécessité de le remplacer durablement.

Il faut dire que le projet est monumental: l’arche s’élévera à 108mètres :  il est mené à bien par un consortium des sociétés Bouyhgues et Vinci avec plus de 1000 ouvriers. Au total, la charpente métallique pèsera 23 000 tonnes, soit près de trois fois le poids de la Tour Eiffel.

Une fois achevée et installée, cette enceinte de confinement qui sera équipée de matériels de haute technologie devrait sécuriser le site d’une part, et permettre la déconstruction du réacteur 4 d’autre part.

Préconisations fortes du CESE sur le climat

Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a présenté en cette fin d’avril deux projets d’avis concernant la préparation de la COP 21, qui se tiendra à Paris en décembre, ainsi que le bilan de 20 ans de politique climatique dans l’Hexagone.

 Il en ressort comme points clefs:

Le premier vise à « Réussir la conférence climat »: ce que chacun d’entre nous ne peut qu’acclamer tant l’urgence se fait sentir.

Pour le second il demande d’assurer l’interministérialité de la politique « climat », actuellement porté seulement par le Ministère de l’Ecologie:  le CESE préconise  la création d’un pouvoir interministériel capable de gouverner la politique climatique avec des déclinaisons territoriales comme le SCRAE. L’avis recommande, pour finir, une présentation annuelle de la politique climatique française, devant le Parlement par le 1er Ministre en personne.

Dans l’objectif de lutte contre le changement climatique, le Cese juge la participation de tous indispensable. Pour rendre effective cette participation, le Conseil préconise une meilleure articulation des politiques nationales, d’une part, et territoriales, d’autre part. Cela passerait par une clarification des objectifs donnés aux collectivités.

Le Conseil préconise que le bilan de GES des collectivités de plus de 50.000 habitants soit accompagné de « la fixation d’objectifs de réduction », définis dans le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE). Le Cese demande à ce qu’un large dispositif de « contrats d’objectifs pour les collectivités pionnières » soit mis en place. Parallèlement, il regrette que les collectivités qui ne sont pas des intercommunalités aient comme seule obligation la publication d’un bilan de GES, comme le prévoit le projet de loi de transition énergétique. « Cela constitue un recul pour bon nombre de collectivités qui s’étaient engagées dans des actions de réduction des émissions », concluent les auteurs du projet d’avis.