Tous les articles par Jacqueline Collard

Une 6ème extinction de masse qui menace l’humanité

Dans une évaluation que les auteurs ont voulu « la plus optimiste possible », des chercheurs américains ont estimé que le rythme actuel d’extinction des espèces était plus de 100 fois supérieur au bruit de fond, soit l’équivalent de la période qui a vu s’éteindre les dinosaures. Si cette estimation est suffisante pour « montrer sans aucun doute possible que nous entrons dans la sixième grande extinction de masse » selon P. Ehrlich (professeur de biologie à Stanford), le chiffre avancé n’est qu’une estimation basse. En effet, l’étude est fondée sur le registre de l’Union internationale pour la conservation de la nature qui ne recence que les espèces vertébrées, c’est à dire possédant un squelette interne (comme les reptiles, mammifères ou oiseaux), qui ne représentent que 30% des espèces connues. Cette publication parue dans Science Advances le 19 juin a été suivie d’une autre quelques jours plus tard, consultable dans Proceedings of the National Academy of Science, et qui fait état d’un chiffre plus effrayant.

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Cette seconde étude n’estime plus à 1,3% mais à 7% la perte de biodiversité terrestre depuis les débuts de l’activité humaine, ce qui représente 130 000 espèces déjà connues et disparues. Fruit d’un travail mêlant deux approches, l’une issue des avis d’experts biologistes et l’autre de mathématiciens probabilistes, les chercheurs sont partis d’un échantillon d’invertébrés et ont extrapolé leurs résultats à l’ensemble des espèces animales terrestres.

Si ces deux études ont des méthodologies différentes et prennent en considération des espèces différentes, elles s’accordent toutes deux pour dire que nous traversons une période de perte massive de biodiversité dont les activités humaines sont à l’origine (changement climatique, pollution, déforestation,…) et qui met en danger notre propre espèce. Ainsi, pour G. Ceballos de l’unviersité autonome de Mexico, « Si on permet que cela continue, la vie pourrait mettre plusieurs millions d’années à s’en remettre, et notre espèce même disparaîtrait probablement assez tôt ».

Plus d’informations sur :

http://www2.cnrs.fr/sites/communique/fichier/cp_museum_sixieme_extinction_pnas.pdf

http://advances.sciencemag.org/content/1/5/e1400253

Bisphénol A, médicaments,…. l’omniprésence des polluants émergents dans nos eaux.

C’est le fruit d’un travail d’un an que l’INERIS (institut national d’évaluation des risques industriels) a publié, recensant l’état de la pollution des eaux superficielles, littorales ou souterraines sur l’ensemble du territoire national par les contaminants « émergents ». Les chercheurs ont axé leur recherche sur les molécules répondant à plusieurs critères : être « mal connues ou peu suivies », d’usage fréquent, et potentiellement dangereuses pour la santé ou l’environnement. Ils ont retenu 180 substances prioritaires, comme le bisphénol A, les phtalates, des pesticides, des plastifiants, des retardateurs de flammes, ou encore des résidus de médicaments ou de produits de beauté…

Les objectifs de ce travail sont à la fois d’établir une liste de substances à surveiller dans les prochains plans de gestion de l’eau, de faire ressortir les lacunes en matière de toxicologie et d’écotoxicologie, et d’évaluer en pratique les méthodes d’analyse les plus facilement utilisables.

Les résultats montrent que certains polluants sont déjà omniprésents. C’est le cas des parabènes (plus de 99% des échantillons analysés), conservateurs présents dans les cosmétiques et suspectés d’accroître le poids des nouveaux-nés. L’INERIS estime également que plusieurs perturbateurs endocriniens « peuvent être considérées comme omniprésentes sur le territoire», comme, le BPA et les phtalates, présents dans plus de la moitié des échantillons. Si la présence quasi-systématique de résidus de pesticides n’étonne plus vraiment, les chercheurs notent tout de même la présence de certains phytosanitaires interdits de longue date comme le DDT par exemple. À ce cocktail s’ajoute la présence de résidus médicamenteux, dont 4 sont retrouvés dans plus de la moitié des échantillons : un anti-épileptique (la carbamazepine), deux anti-inflammatoire (l’acide niflumique et le kétoprofène), et une benzodiazépine (oxazepam).

Plus d’informations sur :

http://www.ineris.fr/centredoc/dp-etude-prospective-def-1435304262.pdf

Urgence annonce le Lancet face aux dérèglements climatiques

Désormais tous les chercheurs scientifiques et médecins sont unanimes:, ils lancent un appel à l’action immédiate au nom de la  Santé et  face au changement climatique.

Agir contre le changement climatique est à la fois une urgence et l’opportunité d’accomplir les plus grands progrès pour la santé publique au cours du 21e siècle. C’est en ces termes que le rapport de la Commission du Lancet sur la santé et le changement climatique présente le défi posé à l’humanité.
Mis en ligne mardi 23 juin sur le site de l’hebdomadaire médical britannique, le document a été rédigé par une équipe universitaire multidisciplinaire européenne et chinoise.
Il s’inscrit dans le cadre d’une collaboration entre The Lancet et le University College de Londres (UCL) qui avait abouti a un premier rapport en 2009 sur la gestion des effets sanitaires du changement climatique. Le rapport de 2009 avait identifié le changement climatique comme « la plus grande menace mondiale pour la santé publique au 21e siècle ». Celui de 2015 estime que « les effets du changement climatique sont déjà perceptibles aujourd’hui et les projections pour l’avenir représentent un risque potentiellement catastrophique d’une ampleur inacceptable pour la santé humaine ».
« Nous sommes partis du constat scientifiquement établi de la menace imminente que constitue l’impact du changement climatique sur la santé », explique Nick Watts (Institute for Global Health, UCL), l’un des quatre coordonnateurs du rapport. La commission voit en effet le danger de voir remis en question les gains en matière de développement et de santé mondiale acquis au cours du précédent demi-siècle.
Cela résulterait des effets directs du changement climatiques que constituent l’accroissement du stress thermique (accumulation de chaleur dans l’organisme), les inondations, la sécheresse et l’augmentation des événements extrêmes comme les tempêtes. Mais s’y ajoutent ses effets indirects, tels la pollution de l’air, l’extension des maladies transmises par des vecteurs (moustiques…), les déplacements de populations et les pathologies mentales comme le stress post-traumatique que provoquent les événements climatiques extrêmes.
« C’est pour cela que nous sommes allés au-delà de ce constat pour traiter des réponses politiques destinées à protéger et à favoriser la santé publique, par exemple en réduisant l’utilisation les émissions de gaz à effet de serre liées à l’utilisation du charbon, en concevant des villes pour les gens et non pour les voitures, en favorisant les transports actifs », poursuit Nick Watts.
Le constat et la nécessité d’agir sont partagés en France par Agnès Lefranc, directrice du département santé environnement de l’Institut de veille sanitaire (InVS): « Les effets directs de l’élévation des températures et des événements extrêmes sont à présent bien établis. Les connaissances scientifiques montrent que le changement climatique, du fait de ces effets directs et d’effets indirects, a des conséquences notables sur la santé. Il est donc impératif d’agir. Agir, cela signifie à la fois limiter les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi s’adapter au changement climatique déja accompli du fait des émissions passées. Nous avons émis beaucoup de gaz à effet de serre et nous n’allons pas revenir en arrière en arrêtant les émissions. Même avec un scénario limitant à 2°C l’augmentation de la température il y aura un impact sur la santé des populations. »
« Si nous agissons maintenant, nous pourrons reprendre le contrôle sur le changement climatique et si nous prenons les bonnes mesures, nous obtiendrons des co-bénéfices. Par exemple en diminuant les émissions de gaz à effet de serre, nous réduirons également les autres polluants comme les particules et les oxydes d’azote. La promotion des combustibles propres pour le chauffage et la cuisine dans les pays en développement diminuera la pollution de l’air intérieur », estime Agnès Lefranc.
Le rapport se fait bien sûr l’écho de la dimension économique des conséquences du changement climatique. « L’Union européenne a évalué à 1600 milliards de dollars (1400 milliards d’euros) le coût annuel de la pollution de l’air extérieur », indique Nick Watts. « La Commission européenne a estimé que dans la seule Union européenne, la réduction de la pollution de l’air découlant des politiques de limitation du changement climatique pourrait entraîner des bénéfices évalués à 38 milliards d’euros par an d’ici à 2050 grâce à une réduction de la mortalité », précise le rapport publié par The Lancet.
« De même, ajoute Nick Watts, la promotion des transports actifs (marche, vélo…) réduirait la fréquence de l’obésité et du diabète et le développement des espaces verts aurait des effets bénéfiques pour la santé mentale. Si certains bénéfices ou bénéfices secondaires mettront du temps à être ressentis l’impact positif sur les maladies cardiovasculaires qu’auraient des mesures comme l’élimination progressive du charbon du bouquet énergétique serait éprouvé beaucoup plus rapidement. Nous l’avons vu avec la lutte contre le tabagisme où dans les deux ou trois semaines après l’arrêt du tabac, il y a une diminution des événements coronariens ».
Le rapport de la commission du Lancet reproduit un graphique tiré d’une étude du Pew Research Center en 2013 sur les perceptions de l’ampleur de la menace que représente le changement climatique dans 39 pays. On y voit la forte prise de conscience dans les différentes régions du monde mais aussi la sous-estimation présente aux Etats-Unis où le climatoscepticisme compte beaucoup de tenants et de puissants soutiens financiers.
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Nick Watts réagit vivement à cette situation : « Il y a assez de preuves, même si la démarche scientifique nous impose de poursuivre les études. Lorsqu’un médecin voit arriver un enfant avec une éruption cutanée, de la fièvre, une raideur de la nuque… il effectue des prélèvements biologiques qui vont être analysés à la recherche de bactéries ou de virus. Mais sans attendre, il va immédiatement mettre l’enfant sous antibiotique car il présente les symptômes d’une méningite. C’est la même chose pour le climat ».
L’éditorial du Lancet accompagnant le rapport presse les dirigeants du monde de passer à l’action et de ne pas s’en tenir aux paroles. Il rappelle qu’en 2014, pour la sixième année consécutive, l’économie mondiale n’a pas atteint les objectifs fixés de réduction des émissions de carbone nécessaires à limiter le réchauffement planétaire à 2°C. Il remarque cependant que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) « a réuni le mois dernier sa première conférence sur la santé et le climat, où ont été reconnues la nécessité de renforcer la résilience face au changement climatique et l’opportunité de réaliser des gains pour la santé publique à travers des mesures de limitation bien planifiées ».
« Nous avons une très bonne collaboration avec l’OMS. Elle accompli un travail inestimable et il faut qu’elle dispose de davantage de fonds pour aller plus loin et aider à préparer les systèmes de santé des pays à revenu faible ou intermédiaire au changement climatique », souligne Nick Watts. C’est là la deuxième des dix recommandations aux gouvernements pour les cinq prochaines années que formule la commission. La première les invite à « investir dans la recherche, le suivi et la surveillance du changement climatique afin de mieux comprendre les besoins d’adaptation et les co-bénéfices sanitaires potentiels de la limitation du climat aux niveaux local et national ».
La parution de ce rapport est saluée par le Dr Maria Neira, directrice du département Santé publique et environnement de l’OMS, qui annonce des initiatives telles que le développement d’une platefome de surveillance de la pollution de l’air, faisant appel à des données satellitaires et la campagne « Ma santé, mon climat ». Cette dernière, détaille Maria Neira « vise à donner un rôle au système de santé et aux médecins dans la lutte contre le changement climatique. En particulier, les pneumologues et pédiatres bien placés pour expliquer le lien entre la pollution de l’air et les allergies et l’asthme ». Dans la perspective de la Conférence des parties qui se tiendra en décembre à Paris, poursuit Maria Neira, l’OMS lancera « un grand réseau avec des associations de médecins pour mener cette campagne. les médecins pourront donner l’exemple et dire aux politiques pourquoi ils doivent prendre des mesures contre le changement climatique ».

Le Parlement Européen réclame un moratoire sur la consommation d’animaux clonés

S’opposant à ce qui semblait laisser une porte ouverte au commerce de viande ou de produit issus du clonage (œuf, lait, …) en Europe par la Commission, nos députés européens de l’environnement et de l’agriculture se sont rangés aux côtés de l’avis des citoyens recueilli dans l’eurobaromètre sur les biotechnologies pour interdire totalement la consommation de l’ensemble de ces produits.

Si l’argument sanitaire est le premier mis en avant par la rapporteur italienne du texte, G Moi : « Nous souhaitons une interdiction totale jusqu’à ce que le consensus scientifique prouve que la consommation d’animaux issus du clonage est 100% sûre pour la santé humaine, et nous ne disposons pas de cette certitude aujourd’hui », les eurodéputés ont également invoqué l’éthique pour le bien-être animal, et l’opposition des consommateurs européens. Renate Sommer, rapporteur allemand à la commission de l’agriculture, s’étonne par ailleurs de la proposition initiale de la Commission dans la mesure où « nous n’avons pas besoin de clonage pour assurer l’approvisionnement de viande dans l’Union européenne ».

Pour garantir l’origine des produits, les députés européens ont appelé à l’instauration d’un système de traçabilité, non prévu par l’exécutif (la Commission) qui s’inquiète des entraves aux commerces que cela représenterait avec les pays extérieurs à l’Union Européenne. En effet, « le clonage animal et la commercialisation des produits de leurs descendants n’est pas rare » dans « certains pays tiers avec lesquels l’UE entretien des relations commerciales » selon G. Moi. Remarque qui pourrait s’appliquer sans les nommer aux Etats-Unis notamment. Les négociations entre nos deux instances européennes reprendront en septembre.

Plus d’informations sur:

http://www.euractiv.fr/sections/sante-modes-de-vie/le-parlement-reclame-un-moratoire-sur-la-consommation-danimaux-clones

http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/ebs/ebs_341_fr.pdf

Un nouveau cancer reconnu maladie professionnelle pour les agriculteurs

Le lymphome non hodgkinien a désormais rejoint le tableau des maladies professionnelles survenant suite à des «travaux exposant habituellement aux composés organochlorés, aux composés organophosphorés, au carbaryl, au toxaphène ou à l’atrazine». Le décret officialisant cette reconnaissance est paru le 9 juin au Journal Officiel, au travers d’un nouveau tableau (le numéro 59).

Les modalités d’exposition prises en compte sont : « la manipulation ou l’emploi de ces produits, par contact ou par inhalation» ou «par contact avec les cultures, les surfaces, les animaux traités ou lors de l’entretien des machines destinées à l’application des pesticides», «sous réserve d’une durée d’exposition de 10 ans».

Texte officiel sur :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030696331