Tous les articles par Jacqueline Collard

Le WWF publie les indices de changements de comportement agricole et alimentaire

Alors que les Etats généraux de l’alimentation se sont achevés avec des décisions politiques imminentes, le WWF France présente les 10 signaux démontrant que la transition agricole et alimentaire est déjà à l’œuvre.

En effet, si les Français ont déjà commencé à changer leurs pratiques et semblent encore plus enclins à le faire demain, les politiques publiques doivent encourager, et non freiner, cette transition agricole. Le WWF France veut contribuer à un nouveau pacte entre les agriculteurs, premières victimes du modèle d’agriculture industrielle dominant, et les citoyens. Augmenter le revenu des premiers, répondre aux attentes des seconds en matière de qualité, réduire la pression que la production agricole exerce sur la planète. Tout cela est à portée de main et doit constituer le cœur de ce nouveau pacte. Les Français y sont prêts. Aux décideurs, publics comme privés, de prendre leurs responsabilités et de saisir cette extraordinaire opportunité.

 Un sondage de l’IFOP d’octobre 2017 met en évidence que 69% de Français sont prêts de payer plus chers pour que vivent les producteurs, 89% souhaitent que moins de pesticides soient utilisés, 62% déclarent rechercher des produits biologiques.

 Après un pic de croissance hors norme en 2015, le nombre de conversions d’exploitations en bio a encore augmenté en 2016. En décembre dernier, le “zéro pesticide” représentait 5,7 % de la surface agricole utile (SAU) du territoire avec plus de 1,5 million d’hectares engagés en bio, soit une hausse de +17 % en un an ! (Source : Agence Bio)
Au total, l’agriculture bio représente aujourd’hui plus de 118 000 emplois directs en équivalent temps plein, soit un gain de 32 500 emplois et une croissance annuelle moyenne de 8,4% de la filière (production, transformation, distribution) en seulement quatre ans ! Les quelque 32 300 fermes bio du pays pèsent désormais pour 10,8% de l’emploi agricole en France. Outre les producteurs agricoles « zéro pesticides », ce sont aussi près de 15 000 entreprises qui travaillent désormais pour la filière bio (+10 %), soit 47 185 emplois. Dans le détail, on dénombre 32 326 exploitants agricoles bio et 14 859 personnes qui travaillent dans la transformation et la distribution de produits bio, ce qui représente une évolution de l’ordre de 12% en l’espace d’un an. (Source : Agence Bio)
En 2016, la consommation bio des ménages français a bondi de 21,7% par rapport à 2015 et le marché a dépassé les 7 milliards d’euros. Soit un gain d’1,2 milliard d’euros en seulement un an. Le bio représente 3,5 % du marché alimentaire des particuliers. (Source : Agence Bio)
 La croissance de la consommation de produits issus du commerce équitable en 2016 a été exceptionnelle : + 42,8% par rapport à 2015. Le marché français atteint désormais 948 millions d’euros. (Source : www.commercequitable.org)
Après le pic de l’après-guerre (+1,5 % par an entre 1960 et 1980) qui a atteint son sommet en 1984 , depuis 10 ans, la consommation de viande en France est en baisse régulière. (Source : France Agrimer)
Entre 2007 et 2013, pour les viandes de boucherie (c’est-à-dire le bœuf, le veau, l’agneau, le porc frais et la viande chevaline), les niveaux sont passés de 58 à 52.5 g/j/personne, ce qui porte actuellement la consommation moyenne hebdomadaire à environ 370 g, soit 3 à 4 portions seulement par semaine. (Source : CREDOC)
En France, de plus en plus d’entreprises, tous secteurs confondus, s’engagent à exclure les œufs de poules élevées en cage de leurs rayons ou de leurs préparations . Aujourd’hui, en France, les œufs dits « alternatifs », représentés par les codes 0,1 et 2 (respectivement élevage bio, plein air et sol) représentent près de 48% en volume du marché des œufs.
Les achats d’œufs biologiques ont progressé de 14% entre 2015 et 2016. Avec 14,3 milliards d’œufs produits en 2016, la France est le premier producteur d’œufs de consommation dans l’UE. Dans l’hexagone, 32 % des poules environ sont élevées en système alternatif, soit 15 millions de pondeuses sur un total d’environ 48,6 millions. (Sources : DGAL, Agence Bio, SYNALAF)
Le gaspillage alimentaire a été réduit de 22% dans les supermarchés ayant participé au projet pilote, encouragé par la loi de lutte contre le gaspillage alimentaire du 3 février 2016 qui interdit de rendre délibérément impropres à la consommation les invendus des industriels et oblige la grande distribution à distribuer les “surplus” alimentaires qu’elle jetait auparavant sous peine d’une amende de 3750 euros par infraction. (Source : Legifrance).
En 2016, près de six établissements scolaires sur dix (60%) ont mis à disposition des plats préparés à partir de produits biologiques, contre 46% en 2011 et seulement 4% avant 2006. Et 32% des établissements proposent des menus entièrement bio. (Source : Agence Bio)   En restauration collective, 78% des produits bio sont d’origine française et 59% d’origine régionale, confirmant ainsi la tendance générale des Français pour la consommation locale.
Et de plus de nouveaux modes de distribution émergent de façon sérieuse:En France, en parallèle de la grande distribution (45% de part du marché bio), 20% des agriculteurs vendent leurs produits en circuits-courts (Source : La Ruche qui dit Oui). Le chiffre d’affaire de la distribution spécialisée bio (Biocoop, Bio c’ Bon, la Vie Claire etc.) a augmenté de 24% entre 2010 et 2016, passant de 1222 à 2497 millions d’euros, soit 37% du chiffre d’affaire total de la filière. (Source : Agence Bio).
Le nombre d’AMAP  continue de progresser. On en recense plus de 2000 aujourd’hui en France contre 1600 environ en 2011. Près de 250 000 familles « amapiennes », soit 300 000 mangeurs environ, s’alimentent grâce aux paniers AMAP. (Source : Amap)

La demande énergétique de l’agriculture s’est accrue considérablement

Lancée après la deuxième guerre mondiale, la «révolution verte» n’avait de vert que le nom, comme le confirment Pedro Pellegrini et Roberto Fernández, agronomes à l’université de Buenos Aires (Argentine). Une étude publiée dans  Proceedings of the National Academy of Sciences (Pnas) nous met en évidence la véritable demande énergétique de l’agriculture à l’échelle mondiale.

La production végétale mondiale a triplé au cours des 50 dernières années,( entre  1961 à 2014) principalement par une augmentation du rendement (production / superficie). Nous montrons que l’énergie intégrée dans les principaux intrants pétroliers (machinerie, carburant et engrais) a augmenté dans le monde entier à un rythme plus important (il y a eu une augmentation de 137% de la consommation d’intrants par hectare), cependant moins rapide au cours des dernières décennies, que la production agricole.

Cela a été expliqué par les progrès dans l’industrie des engrais azotés, l’irrigation, et d’autres technologies et peut-être quelques changements environnementaux. Ces résultats correspondent au «paradoxe de Jevons*»: les gains d’efficience, tant pour l’EUE que pour la terre (rendement), n’ont pas permis de réaliser des économies de ressources. Tout comme l’augmentation de la production ne garantit pas la réduction de la faim, les technologies permettent de réaliser des économies sur les terres (et la biodiversité), mais leur réalisation dépend de décisions politiques audacieuses.

Dans l’ensemble, l’efficacité de l’utilisation de l’énergie (production végétale / intrants) a suivi une trajectoire en U commençant à 3 et se terminant près de 4. Les perspectives d’une intensification plus durable sont discutées, et l’inadéquation du modèle d’épargner la nature sauvage via l’agriculture intensifiée est mise en évidence.

*Le paradoxe de Jevons a initialement été formulé par l’économiste britannique du nom de William Stanley Jevons dans son livre Sur la question du charbon en 1865. L’homme va faire une observation capitale qui peut nous être utile aujourd’hui. Ce paradoxe est le suivant : À mesure que les améliorations technologiques augmentent l’efficacité avec laquelle une ressource  est employée, on observe que la consommation globale de cette ressource augmente. En termes simples, plus une énergie est maîtrisée (donc démocratisée), plus sa consommation augmente: une réflexion à avoir dans le cas d’une transition énergétique réussie.

Vandana Shiva : Transformer le cercle infernal en cercle vertueux.

Transition, solidarité, paix, économie de demain…, nous plongeons avec elle, et grâce à notre traducteur Xavier Combes, au cœur des réflexions et des propositions que nous offre son livre Le cercle vertueux.La rencontre entre Vandana Shiva et Nicolas Hulot a eu lieu en marge de la COP21 et s’est révélée fusionnelle. Leur discussion, orchestrée par Lionel Astruc, a débouché sur une définition commune des enjeux auxquels il faudra faire face et a permis de mettre en lumière des mesures concrètes destinées aux citoyens et aux décideurs politiques.

La dégradation de l’environnement et les catastrophes liées au réchauffement climatique touchent certaines populations plus que d’autres : les pays les plus pauvres et les revenus les plus modestes. Ils sont également les plus durement frappés par la perte de biodiversité, les problèmes d’accès à l’eau potable et à un air pur, la dégradation des sols, etc.
Comment inverser ce cercle infernal ? Réconcilier environnement, solidarité et économie, paroles croisées avec Nicolas Hulot, dans un entretien mené par Lionel Astruc, paru aux éditions Actes Sud.

Un livre de Frédéric Denhez pour savoir ce qu’est le bio

Fréderic Denhez, rappelle qu’il n’existe pas de produits  » bio  » en soi mais que les aliments ainsi estampillés doivent s’inscrire dans un écosystème général, qu’il nomme  » la bio « . Par exemple, la mention  » AB  » ne garantit pas au consommateur que le produit n’a pas voyagé ou qu’il a été cultivé avec des pratiques peu agressives pour le sol. Il explique que des labels moins  » verts « , comme le  » label rouge  » pour la viande de bœuf française, doivent satisfaire à une réglementation plus stricte que la certification AB.

Le bio, finalement c’est juste le label AB. Presque une marque. C’est le bio que l’on connaît : des produits achetés,  » propres « , sans savoir ce qu’il y a derrière. C’est un bio conforme à un cahier des charges qui n’est réellement restrictif que sur les intrants chimiques. Pour le reste, les agriculteurs font un peu ce qu’ils veulent. Tandis que « la bio » est une démarche philosophique qui va plus loin que la réglementation sur les pesticides. Elle vise à produire avec un impact environnemental et sociétal limité.  » La bio  » doit avant tout nourrir l’agriculteur, sans abîmer les sols ni la nature, avec un bon bilan carbone, en respectant les qualités nutritionnelles et gustatives des produits, et le bien-être animal.AB. Ces deux lettres sur fond vert, les Français les connaissent bien pour les voir fréquemment sur les emballages dans les rayons et magasins bio. 97% de la population connaît ce logo indique d’ailleurs le dernier baromètre Agence bio/CSA. Bien que facultative depuis quelques années, la marque propriété du ministère de l’Agriculture reste bien plus connue que son homologue européen, l’Eurofeuille, qui n’est familier que pour six Français sur dix.

Or, devant cet intérêt pour le bio avec un marché qui croît de­ 17 % par an et  génère  plus de ­8 ­milliards­ d’euros, industriels et distributeurs se ­ruent sur l’or vert : à nous consommateurs d’être vigilants et exigeants ;  ce livre est là pour nous aider.

Eau : les nitrates seraient liés au cancer colorectal

Une étude danoise publiée dans l’International Journal of Cancer. nous met en évidence une nouvelle fois les risques potentiels de la présence des nitrates dans les eaux de consommation, alors que depuis longtemps des études démontaient les effets délétères en particulier pour les enfants et les femmes allaitantes. Cette étude fait le lien avec le cancer colorectal.

La concentration « naturelle » en nitrates des eaux souterraines en l’absence de fertilisation va de 5 à 15 mg/l (NO3). Mais la source majeure provient de l’apport d’engrais azotés. Cet apport peut se faire soit directement sous forme de nitrates, soit sous forme d’ammoniac, ou d’urée, lesquels se transforment dans le sol en nitrates. Certains engrais associent les deux formes, comme le nitrate d’ammonium, qui dans les sols libère immédiatement des nitrates, avant de générer plus lentement des nitrates issus de l’oxydation de l’ammoniac. Les lisiers d’élevage libèrent surtout la forme ammoniaquée. Les nitrates dans les eaux continentales proviennent à 66 % de l’agriculture (engrais azotés et lisier). Le reste est issu des rejets des collectivités locales (22%) et de l’industrie (12%).

Rappelons que la norme de 50mg/l est celle qui est retenue depuis des années en France. Le décret 2001-1220 du 20 décembre 2001 fixe cette limite à 50 milligrammes par litre en nitrates de l’eau destinée à la consommation humaine. La norme de 50 mg/L a été fixée en fonction des risques courus par les populations les plus vulnérables Les nitrates dans l’eau sont souvent  issus de l’emploi de fertilisants agricoles,ceux ci ont la fâcheuse manie de se transformer en composés N-nitroso, fortement cancérigènes –de la même manière que les nitrites, utilisés par l’industrie alimentaire en particulier…

L’ion nitrate est la forme stable de l’azote, formé par l’association d’un atome d’azote avec trois atomes d’oxygène. Une fois ingéré, il peut être réduit en nitrite par les bactéries présentes dans le corps, en particulier dans la bouche, mais aussi l’intestin grêle et le côlon. A partir de 25 mg/L, les nouveaux-nés peuvent manquer d’oxygène parce que les nitrites issus des nitrates oxydent le fer ferreux (Fe2+) de l’hémoglobine des globules rouges en fer ferrique (Fe3+). La méthémoglobine qui en résulte est incapable de fixer l’oxygène. Dans un milieu acide, l’estomac par exemple, l’ion nitrite donne naissance à de l’acide nitreux qui génère du dioxyde d’azote. Le dioxyde d’azote est capable de réagir avec des susbtances azotées qu’on appelle amines pour former des individus très peu fréquentables, les nitrosamines. Les nitrosamines endommagent les gènes et provoquent des cancers dans toutes les espèces animales. Les nitrites représentent un risque pour la santé du nourrisson de moins de 6 mois en raison de l’immaturité de l’activité de la « méthémoglobine réductase ». Les adultes porteurs d’un déficit enzymatique (en G6PDH ou en MetHb-réductase) sont également exposés.

Listes des zones vulnérables aux nitrates au 21 février 2017 en auvergne Rhône-Alpes

http://draaf.auvergne-rhone-alpes.agriculture.gouv.fr/Revision-du-zonage-dit-zones

Ward MH : Workgroup Report: Drinking-Water Nitrate and Health—Recent Findings and Research Needs. Environ Health Perspect. 2005, 113(11): 1607–1614.

http://onlinelibrary.wiley.com