Tous les articles par Jacqueline Collard

Fin de la COP 24 sans éclats

La conférence, qui s’est achevée avec plus de 24 heures de retard sur le planning prévu, n’a  pas donné lieu à de nouveaux engagements des Etats à relever prochainement leurs objectifs de réduction des gaz à effet de serre, insuffisants à ce stade face aux dérèglements du climat.

Il y a quelques semaines, les scientifiques du Giec tiraient la sonnette d’alarme: dans un monde à +2°C, objectif minimal du pacte climatique de 2015, les impacts seraient bien plus importants que dans un monde à +1,5°C, limite idéale de l’accord.

Mais pour rester sous +1,5°C, il faudrait réduire les émissions de CO2 de près de 50% d’ici 2030 par rapport à 2010, alors que les engagements actuels des Etats annoncent un monde à +3°C avec son lot de tempêtes, sécheresses, inondations…La Russie a fait parler d’elle :  Aux côtés des États-Unis, de l’Arabie saoudite et du Koweït, la Fédération s’est opposée aux 192 autres États membres en refusant le terme “accueillir favorablement ” (welcome) pour souligner l’intérêt de la COP24 pour le rapport du Giec sur les 1,5 °C.

Alors que les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont reparties à la hausse au niveau mondial, Germanwatch et le New Climate Institute ont publié, le 10 décembre, le nouvel index des performances climatiques par pays. Dans le groupe des pays intermédiaires, la France perd 6 places.  «Aucun des 56 pays analysés, ni de l’Union européenne, n’a une trajectoire lui permettant de rester au-dessous des 2°C de réchauffement», décrypte l’ONG

La France a  cependant signé une déclaration pour renforcer la tarification du carbone en Europe, à cette occasion: déclaration  signée par neuf pays européens, dont la France représentée par Brune Poirson, secrétaire d’Etat à la Transition écologique. « Dans le but d’atteindre les objectifs de long terme de l’Accord de Paris, de meilleures mesures doivent être prises pour renforcer le signal envoyé par le prix du carbone afin d’améliorer dans l’ensemble son ambition, sa couverture et sa prévisibilité », se sont engagé les pays signataires parmi lesquels ne figure pas l’Allemagne.

Selon la déclaration, la tarification carbone « mise en place avec des politiques et mesures d’accompagnement » est essentielle pour « délivrer un signal clair de long terme aux acteurs économiques » et « inciter à réduire les émissions de gaz à effet de serre de façon économiquement efficace ».

https://www.climate-change-performance-index.org/sites/default/files/documents/ccpi_2019_resultats.pdf

4 cancers sur 10 sont liés à nos modes de vie (BEH N°21)

Nous relayons les statistiques transmises par le Bulletin épidémiologique hebdomadaire N°21 à savoir que 4 cancers sur 10 pourraient être évités, puisque liés à nos modes de vie.

La part des cancers dits « évitables », c’est-à-dire attribuables à des facteurs de risque liés au mode de vie ou à l’environnement, vient d’être réévaluée pour la France métropolitaine : elle représenterait 41 % des tumeurs survenues en 2015 chez les adultes de plus de 30 ans, soit 142 000 cas (84 000 chez les hommes et 58 000 chez les femmes). Cette estimation est le fruit d’une vaste étude coordonnée par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), publiée lundi 25 juin dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH)N° 21.

En 2000, la part des cancers évitables était évaluée en France à 35 %, tandis que les études portant sur d’autres pays donnent une fourchette variant entre 30 % et 50 %.

L’originalité de l’étude, par rapport aux évaluations antérieures, est d’avoir élargi le spectre des causes évitables à treize facteurs majeurs de risque pour lesquels un lien avec la survenue de cancer est bien établi, et pour lesquels l’exposition des Français était connue. La consommation de viande rouge et de charcuterie ou les expositions professionnelles (trichloréthylène, gaz d’échappement du diesel) n’étaient par exemple pas prises en compte auparavant.

Isabelle Soerjomataram, qui, au CIRC – agence intergouvernementale de recherche sur le cancer créée en 1965 par l’Organisation mondiale de la santé –, a coordonné l’étude, souligne que le message principal est positif : « C’est une bonne nouvelle de savoir que l’on peut agir sur 40 % des cancers, en se concentrant sur treize facteurs de risque seulement. »

Le déclenchement d’un cancer peut évidemment avoir des origines multiples et combinées. La part du hasard, c’est-à-dire liée à la survenue de mutations aléatoires dans l’ADN des cellules, fait l’objet d’âpres débats scientifiques. Elle est évaluée par certains à deux tiers des mutations susceptibles de déclencher un cancer. Le poids de l’hérédité, c’est-à-dire les prédispositions à développer certains cancers en raison de son patrimoine génétique, représenterait environ 5 % des cas.

Restent les cancers dits « évitables ». Tout l’intérêt de l’étude du BEH est donc de chiffrer le poids des déterminants sur lesquels on peut agir en modifiant des comportements (tabac, alcool, alimentation, activité physique) par la réglementation (polluants, pesticides, composants alimentaires) ou la prophylaxie (vaccins).

Sans surprise, le tabac et l’alcool restent les deux principaux « fauteurs évitables » de cancers, représentant 20 % et 8 % des cas, les deux sexes confondus. Chez les hommes, c’est ensuite l’alimentation qui prédomine (5,7 % des cas), tandis que chez les femmes, c’est le surpoids et l’obésité (6,8 %). « Je ne m’attendais pas à ce que ces facteurs de risque soient si élevés, commente Isabelle Soerjomataram. Il semble que la France suive dans ce domaine la trajectoire de pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. »

« Cet état des lieux a permis de mettre en exergue des lacunes scientifiques (comme les expositions chimiques), mais aussi le besoin de recherche pour identifier le rôle de facteurs de risques émergents (comme les perturbateurs endocriniens) », notent ainsi Christopher Wild, directeur du CIRC, Norbert Ifrah, président de l’Institut national du cancer, et François Bourdillon, directeur général de l’agence sanitaire Santé publique France dans l’éditorial du BEH. Cela signifie que, à mesure que des données plus solides apparaîtront, la part des cancers évitables pourrait encore augmenter.

Il est aussi à noter que les outre-mer n’ont pas été inclus. Le poids du chlordécone, un pesticide longtemps utilisé dans les bananeraies, serait sans doute à prendre en compte pour les cancers de la prostate. « On aimerait poursuivre l’analyse dans ces territoires », note Isabelle Soerjomataram, pour qui les facteurs de risque seraient alors probablement différents.

Le décret du 10 décembre 2018 permet la mise en application de la loi Élan

Le 18 décembre est paru le Décret n° 2018-1123 du 10 décembre 2018
relatif à l’extension du régime de la déclaration préalable aux projets d’installation d’antennes-relais de radiotéléphonie mobile et à leurs locaux ou installations techniques au titre du code de l’urbanisme, ceci avec l’objectif de lutter contre les « zones blanches » du réseau téléphonique et l’accélération du déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire national, le gouvernement et le législateur ont intégré dans la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ou loi « ELAN ») de nombreuses dispositions permettant de faciliter l’implantation des antennes relais. La rapidité de la réalisation du décret d’application reste cependant peu courante!
 Or ce texte soumet explicitement ces installations au régime de la déclaration préalable de l’article R. 421-9 du Code de l’urbanisme.
Il a pour objet : extension du régime de la déclaration préalable aux projets d’installation d’antennes-relais de radiotéléphonie mobile et de leurs locaux ou installations techniques.
Éliminant certaines contraintes (réduction du délai d’instruction préalable et suppression du critère de hauteur, notamment), il simplifie considérablement les formalités liées à l’installation des antennes relais. Après les modifications dues à la loi Elan , les opérateurs ont dorénavant les mains libres.  Au nom de la réduction de la fracture numérique, l’article 62 du texte prévoit en effet une annulation des dispositions de la loi Abeille (2) ce qui obère  l’exposition des populations.
Nous  déplorons  également la déréglementation qui touche le déploiement des antennes relais, dont le démantèlement de la loi n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, de cette loi Abeille.
Nous  demandons que les pouvoirs publics et les institutions concernées jouent véritablement leur rôle de régulateur et assure la protection de la santé des populations plutôt que de concourir à la course effrénée à des technologies liées au seul profit au détriment de l’humain.

La justice européenne annule les dérogations aux limites d’émission d’oxydes d’azote

Alors que des fraudes aux contrôles d’émission viennent d’être révélées, la Commission européenne adopte, le 20 avril 2016, un règlement encadrant les nouveaux tests des véhicules particuliers et des utilitaires légers en conditions de conduite réelles (RDE). Elle devient moins exigeante  sur les limites d’émission des oxydes d’azote par rapport à la norme Euro 6 établie en 2007. Ainsi au lieu de 80 milligrammes par kilomètre, elle autorise un dépassement de 110% du plafond d’émission d’oxydes d’azote pour les nouveaux modèles à partir de septembre 2017 et pour tout nouveau véhicule à partir de 2019 (soit 168 mg/km). Le dépassement devait ensuite se réduire à 50% à partir de janvier 2020 pour les nouveaux modèles et janvier 2021 pour tout nouveau véhicule (soit 120 mg/km). Soit à accepter des années de dépassement.

Mais en mai 2018 pour la première fois en Europe, des maires de capitales européennes Paris, Madrid et Bruxelles concernés par l’établissement de plafonds d’émission de polluants automobiles, saisissent  la justice, en demandant l’application des valeurs d’émission historiques de la norme Euro 6 et simultanément, au titre de leurs compétences en matière de protection de l’environnement et de la santé, elles adoptent des mesures de restriction de la circulation automobile afin de lutter contre la pollution avérée de l’air sur leurs territoires.

 Pour rappel la pollution automobile coûte chaque année à l’Union européenne (UE) jusqu’à 80 milliards d’euros, dont 75% liés aux véhicules diesel, comme l’avait révèlé une étude publiée mardi 27 novembre et menée pour le compte de l’European Public Health Alliance (EPHA) sans compter bien sur les 400.000 morts prématurés, dues notamment à des cancers, des maladies cardiovasculaires et des maladies respiratoires..

Dans un arrêt du 13 décembre,  les magistrats du tribunal européen déclarent  cette demande recevable et exige  que  la norme Euro 6 soit  respectée en conditions de conduite réelles et  confirmant la requête des élus.

Bruxelles doit désormais revoir au plus vite sa copie. Et rétablir rapidement la norme Euro 6. Pour tous les véhicules particuliers et utilitaires légers. Et tous les types de tests.

https://epha.org/ce-delft-health-impacts-costs-diesel-emissions-eu/

https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2018-12/cp180198fr.pdf

L’amiante de nouveau médiatisée : rejet des condamnations par la Cour de Cassation

L’amiante provoque un cancer spécifique, le mésothéliome (cancer de la plèvre) et est responsable de 10 % à 20 % des cancers du poumon. En France, selon les autorités sanitaires, cette fibre est responsable d’environ 3 000 décès par cancers chaque année. Selon une étude de 2012 de l’Institut de veille sanitaire, elle devrait provoquer au total entre 130 000 et 180 000 décès dans l’Hexagone. Mais selon Me Guillaume Hannotin, avocat de l’Ardeva 59-62 et du Comité anti-amiante Jussieu, elles ne constituent qu’un nouvel épisode de l’interminable bataille judiciaire que ses clients ne sont pas disposés à abandonner.Chaque jour, l’amiante – dont les effets se font sentir plusieurs dizaines d’années après exposition – cause de nouveaux décès. Et ses victimes représentent autant de faits nouveaux à juger. »

Or la chambre criminelle de la Cour de cassation a confirmé ce mardi 11 décembre, l’annulation des mises en examen pour « homicides et blessures involontaires » de huit responsables nationaux dans les dossiers du scandale sanitaire de l’amiante du Comité anti-amiante du campus universitaire parisien de Jussieu, et pour ceux des chantiers navals de la Normed de Dunkerque adossé à l’Association régionale des victimes de l’amiante du Nord-Pas-de-Calais (Ardeva 59-62).

Rappelons que l’amiante a été reconnue comme cancérogène par le CIRC dès 1973 et finalement bannie en France en 1997 , dés 1982 avait été crée le  « Comité permanent amiante » (CPA)une structure de lobbying financée par les industriels de l’amiante et accusée par les parties civiles d’avoir promu « l’usage contrôlé » de l’amiante, que la bataille anti-amiante  avait  commencé dès 1996. Dans ce dernier round  les associations de défense des victimes contestaient une décision rendue le 15 septembre 2017 par la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris: la chambre de l’instruction avait estimé que les risques liés à l’amiante étaient insuffisamment connus à l’époque des faits et que ces personnes ne disposaient d’aucun pouvoir décisionnaire, ce qui les exonérait de toute responsabilité.

Le Comité anti-amiante Jussieu et l’Ardeva 59-62 ont annoncé qu’elles déposeraient une requête devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), notamment sur le principe du « procès équitable »