Tous les articles par Jacqueline Collard

La Cour des comptes épingle la politique de réduction des pesticides

Alors que la consommation de produits phytosanitaires en agriculture a augmenté de 21% en France en 2018, selon un bilan en janvier du Plan Ecophyto 2, chapeauté par quatre ministères: Agriculture, Santé, Recherche et Transition écologique, que le Grenelle de l’environnement fin 2007,  avait fixé un objectif de réduction de 50% de l’usage des pesticides de synthèse en 10 ans, les deux plans successifs mis en œuvre, Ecophyto 1 et 2, ont abouti à des échecs. En avril, le gouvernement a donc tenté pour la troisième fois de désintoxiquer l’agriculture des excès de la chimie en lançant un plan Ecophyto 2+:mais entre temps ce rapport de la Cour des Comptes met l’accent sur les dérives déjà fort médiatisées.

En dépit de ces actions et de la mobilisation de fonds publics pouvant être estimés, pour 2018, à environ 400 millions d’euros (dont 71 millions prélevés sur la redevance pour pollutions diffuses), plusieurs travaux d’évaluation ont dressé un bilan réservé de l’action menée. La Cour constate, pour sa part, que les effets des plans Écophyto demeurent très en deçà des objectifs fixés », indique-t-elle dans un référé datant de novembre 2019 et rendu public .

« L’objectif du gouvernement est d’améliorer la lisibilité, de permettre une vision pluri-annuelle sur les financements mobilisés dans le cadre d’Ecophyto et de simplifier les circuits de financements », indique le 1er ministre qui s’engage à le faire dès 2020.  Il rapelle que « les quantités de produits phytopharmaceutiques les plus préoccupants pour la santé et l’environnement ont diminué, entre 2009-2011 et 2016-2018, de 15% pour les produits dits +CMR 1+ et de 9% pour les produits dits +CMR 2+ (en moyenne triennale) ». Les CMR sont considérés comme cancérogènes, mutagènes, et toxiques pour la reproduction.

La choration de l’eau remise en question par une étude du EHP

Dans la revue Environmental Health Perspectives (EHP), une trentaine de chercheurs publient la première estimation du nombre de cancers de la vessie attribuables, en Europe, aux méthodes de traitement de l’eau du robinet .

Chaque année, environ 6 500 Européens contracteraient cette pathologie cancéreuse en raison de leur exposition aux trihalométhanes (THM) issus de la chloration de l’eau potable. La disparité des concentrations relevées dans l’Union européenne est importante, mais les chercheurs envisageaient une décroissance de 2800 du nombre de cancers par un changement de pratiques.

Les THM se forment par réaction entre la matière organique présente dans l’eau et le chlore utilisé pour sa désinfection. Leur association avec le cancer de la vessie est connue depuis de nombreuses années et leur concentration ne doit pas excéder, selon la réglementation européenne actuelle , le seuil de 100 microgrammes par litre (µg/L). Les valeurs moyennes, par pays, rapportés par les chercheurs n’excèdent jamais ce taux. Le plus mauvais élève est la Roumanie (91,8 µg/L), suivi de Chypre (66,2 µg/L), Malte (49,4 µg/L) et l’Irlande (47,3 µg/L). La France se situe dans la moyenne de l’UE, avec une concentration moyenne de THM de 11,7 µg/L.

Environmental Health Perspectives (EHP),https://ehp.niehs.nih.gov/doi/10.1289/EHP4495

The study area comprises the 28 countries of the European Union in 2016 (404,672,106 inhabitants over 20 years of age) (IHME 2016b). These countries are Austria, Belgium, Bulgaria, Croatia, Cyprus, Czech Republic, Denmark, Estonia, Finland, France, Germany, Greece, Hungary, Ireland, Italy, Latvia, Lithuania, Luxembourg, Malta, the Netherlands, Poland, Portugal, Romania, Slovakia, Slovenia, Spain, Sweden, and the United Kingdom.

l’ONU demande pour la COP 15 une préservation de la planète pour 2030

Enrayer l’érosion de la biodiversité, gérer les ressources de manière durable et restaurer les écosystèmes. Telles sont les missions de la 15e Conférence des parties (COP15) de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB), programmée en octobre à Kunming, en Chine, sur le modèle des conférences climat. Des négociations internationales doivent y aboutir à l’adoption d’une feuille de route mondiale pour sauver l’ensemble des écosystèmes.

Une première ébauche de texte comprenant 17 objectifs, parmi lesquels une proposition ambitieuse : protéger au moins 30 % de la planète – terre et mer – d’ici à 2030. « L’objectif est de stabiliser le taux de perte de biodiversité d’ici à 2030, puis de faire en sorte que cette biodiversité augmente de nouveau d’ici à 2050 en laissant les écosystèmes se régénérer », explique Aleksandar Rankovic, chercheur à l’Institut du développement durable et des relations internationales, chargé du dossier COP15.

Selon ce rapport, 75 % de l’environnement terrestre a été « gravement altéré » par les activités humaines et 66 % de l’environnement marin est également touché. Résultat : environ un million d’espèces animales et végétales sur les quelque 8 millions estimées sur Terre sont menacées d’extinction, dont « beaucoup dans les prochaines décennies ». Près de 23 % des oiseaux, 25 % des plantes, 33 % des récifs coralliens, 40 % des amphibiens, 10 % des insectes et plus d’un tiers des mammifères marins sont menacés.

Le procés de la Dépakine ouvre une mise en examen pour le groupe qui la commercialise

La molécule princeps du médicament, le valproate de sodium, est commercialisée depuis 1967 sous la marque Dépakine, est à l’origine d’un risque élevé de malformations congénitales sur le foetus s’il est pris par une femme enceinte.

La Dépakine et ses dérivés ont provoqué depuis 1967 des malformations congénitales graves chez 2 150 à 4 100 enfants, selon une évaluation de l’ANSM et de l’Assurance maladie. L’épidémiologiste Catherine Hill avance le chiffre de  14 000 victimes

L’ouverture de l’instruction faisait suite à une enquête préliminaire menée sous l’autorité du parquet depuis septembre 2015, après les premières plaintes de victimes. Dans un rapport de février 2015, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) avait estimé que Sanofi mais également l’Agence du médicament (ANSM) avaient fait preuve d’une « faible réactivité »

En raison des retards de prise en compte du risque malformatif de ces médicaments, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé avait  saisi, le 22 juin 2015, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) d’une mission d’enquête sur les spécialités pharmaceutiques contenant du valproate de sodium (Dépakine, Dépakote, Micropakine et génériques). « Les autorités sanitaires nationales et européennes, ainsi que le principal industriel titulaire de l’autorisation de mise sur le marché [Sanofi], ont manqué de réactivité. »

Depuis juin 2015, la délivrance du médicament par le pharmacien nécessite la présentation de l’accord de soins signé en plus de l’ordonnance, pour les nouvelles patientes (l’accord doit être conservé dans son dossier médical). En ce qui concerne les patientes actuellement traitées, la présentation de l’accord de soins est obligatoire depuis le 1er janvier 2016.

Après plus de trois années d’enquête, le couperet est tombé : les juges chargés de l’enquête sur la commercialisation de l’anti-épileptique dépakine et ont mis Sanofi en examen pour « tromperie aggravée et « blessures involontaires », a annoncé le groupe pharmaceutique , mais qui compte faire appel.

Valproate de sodium, dans quelle situation sommes-nous aujourd’hui ?

  • Le laboratoire se défend d’avoir commis un impair.
  • Le nombre de victimes grimpe vertigineusement. Il pourrait atteindre plusieurs centaines, voire des milliers de personnes. Une association l’Apesac (Association des Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anti-Convulsivant). porte à bras le corps cette lutte, aidée par un avocat qui a notamment défendu les victimes du Mediator. La justice a été saisie pour déterminer les éventuels coupables.
  • l’assocition a recensé dans sa propre comptabilité 1667 victimes de la molécule valproate de sodium, dont 309 morts.
  • De nouvelles mesures ont été prises pour une meilleure information.
  • Une filière pour diagnostiquer et prendre en charge les enfants victimes devrait être créée.

Le conseil constitutionnel met en application l’article 45 de la loi Egalim

L’interdiction en 2022 de « la production, du stockage et de la vente de produits phytopharmaceutiques » contenant des substances prohibées par l’UE, et destinés à des pays tiers, figurait dans la loi agriculture et alimentation (Egalim), promulguée le 30 octobre 2018, elle est validée par le Conseil Constitutionnel  en ce début d’année. Cette dernière prévoiyait explicitement que « sont interdits, à compter du 1er janvier 2022, la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par l’Union européenne pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l’environnement ».

Le Conseil constitutionnel français a « pour la première fois » privilégié la protection de l’environnement, en validant vendredi 31 janvier 2020 l’interdiction de production en France et d’exportation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances bannies par l’UE, cependant ils pourront être encore produits sur le sol français et exportés jusqu’en 2022.

L’UIPP rejointe par l’Union française des semenciers, avait déposé en novembre 2019 une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), soutenant que « l’interdiction d’exportation (…) était, par la gravité de ses conséquences pour les entreprises productrices ou exportatrices, contraire à la liberté d’entreprendre« . Par cette décision, le Conseil constitutionnel affirme, « pour la première fois« , qu’il appartient au législateur de concilier « les objectifs de valeur constitutionnelle, de protection de l’environnement et de protection de la santé avec l’exercice de la liberté d’entreprendre« .

Nous assistons peut-être à un tournant décisif dans la hiérarchisation des droits. Pour une fois, l’écologie et le vivant l’emportent sur la recherche de profits et l’intérêt des industriels« , a commenté Jean-François Julliard, patron de Greenpeace France.