Notre partenaire La Criirad fait un communiqué à cette occasion:
Il y a 50 ans, le 2 juillet 1966, la France réalisait une première explosion nucléaire sur l’atoll de Moruroa
en Polynésie. Entre 1966 et 1974, la France a réalisé 46 essais nucléaires atmosphériques1 à Moruroa et
Fangataufa. Certains de ces essais ont entrainé des retombées radioactives très importantes sur des îles
et atolls habités, à plusieurs centaines de kilomètres des lieux des tirs.
La contamination résiduelle à 500 km de Moruroa
Les bandes de croissance des coraux2 prélevés par la CRIIRAD dans le lagon de l’île de Mangareva (archipel des Gambier), située à environ 500 km à l’est sud-est de Moruroa, conservent la mémoire des retombées de carbone 14, strontium 90, uranium 236 (isotope artificiel de l’uranium) et plutonium. On détecte toujours ces éléments plusieurs décennies après les retombées, du fait de leur longue période physique.
Heureusement, cinquante ans après les premières retombées, les éléments radioactifs à courte période ont totalement disparu, c’est le cas par exemple de l’iode 131 de période 8 jours. La contamination résiduelle ne conduit plus aujourd’hui à une exposition notable des habitants de l’île. Mais, à l’époque des retombées, la contamination de l’air, puis celle des sols et de la chaîne alimentaire ont entrainé une exposition de la population nettement supérieure aux normes sanitaires.
Cinquante ans après, trop de questions restent sans réponse
L’évaluation de l’impact des essais atmosphériques de 1966 à 1974 sur la santé des populations et des
travailleurs exposés nécessitera :
1 / la communication de toutes les archives des militaires et du CEA (notamment du SMSR et du SMCB).
Ceci afin de se prononcer sur le niveau de protection des populations et de réaliser des évaluations
dosimétriques les plus précises possibles.
2 / la réalisation d’études épidémiologiques indépendantes portant sur les pathologies cancéreuses, mais aussi sur l’ensemble des pathologies non cancéreuses susceptibles d’apparaître chez les personnes exposées et leur descendance. Une partie des effets sanitaires induits sur les populations exposées à l’époque, ou sur leurs descendants, a déjà pu se manifester, d’autres pathologies sont à venir. L’évolution des connaissances sur les effets sanitaires des faibles doses de radiation, en particulier lors de contaminations internes (inhalation et ingestion), montre que les cancers ne sont pas les seules pathologies à craindre, il faut y ajouter des conséquences négatives sur le système immunitaire, le système cardio- vasculaire, le système nerveux ou le système digestif, ainsi que les instabilités du génome, etc….
3 / le lancement d’études biologiques spécifiques sur les personnes exposées (enregistrement des
anomalies chromosomiques, dosimétrie biologique, etc..).
Sur tous ces aspects, il est indispensable que soit mis en œuvre un comité de pilotage regroupant des
spécialistes de l’ensemble des disciplines concernées ainsi que des représentants des populations, anciens travailleurs et élus. Les populations exposées ont le droit de savoir et d’être indemnisées en conséquence.
Rédaction : Bruno CHAREYRON, ingénieur en physique nucléaire, directeur du laboratoire de la CRIIRAD
Contact : bruno.chareyron@criirad.org / Mobile : 06 27 27 50 37
http://www.criirad.org/actualites/dossiers2006/polynesie/sompolynesie.html
Rapport CRIIRAD N°13-24 : Expertise radiologique sur les coraux du lagon des Gambier (Polynésie Française) / Mai 2013. Etude réalisée par le laboratoire de la CRIIRAD à la demande de la Délégation pour le suivi des Conséquences des Essais Nucléaires (DSCEN).